21 juin 2002

Ce soir ce sera une bière. Pas de porto, pas de rhum, une simple bière. Une bonne vieille bière.

Ça fait drôle de revenir écrire ici après presque une semaine d'absence. Un exil volontaire dont j'avais besoin. J'avais autre chose à faire avec mon ordinateur qu'écrire mon journal. Je n'ai même pas lu les autres journaux depuis tout ce temps, et c'est à peine si j'ai vérifié mes courriels une ou deux fois. Bref, j'ai complètement décroché du monde des diaristes.

En passant, c'est l'été aujourd'hui. Il était temps.

Sur le plan professionnel: la semaine s'est déroulée de façon habituelle. Mon patron et moi n'avons pas reparlé du dossier controversé, qui est sur la glace ces temps-ci de toute façon. Même mes rapports professionnels avec le con étaient pas si mal.

Sur le plan relationnel: Je m'entend toujours aussi bien avec la collègue que vous connaissez. Mais notre relation stagne. Rien ne change, rien n'évolue. Peut-être cela lui convient-il parfaitement, mais moi je trouve ça difficile. Je ne peux rien y changer de toute façon. Elle est encore avec son chum, et ils s'entendent toujours à merveille, selon ses dires.

Une première aujourd'hui: Consoeur et l'amant présumé ont osé se promener main dans la main aujourd'hui, et devant moi en plus !

Drôles de retrouvailles cette semaine. J'ai passé l'après-midi de mercredi chez Nikita. Elle m'a présenté son petit bébé. Ça faisait tellement drôle de la voir en bonne petite mère de famille. C'est une vie complètement différente de ce qu'elle a toujours connu. Mais elle s'y adapte bien, et elle adore son enfant. De plus, la maison qu'elle et son conjoint se sont acheté est vraiment bien. Peu de terrain, mais complètement à l'abris des regards. Sans compter la piscine intérieure.

Nikita et moi devrons reconstruire une relation sur des bases complètement nouvelles. Je crois qu'autant elle que moi sait que les personnes que nous avons connues à Cuba ne sont pas les personnes que nous sommes réellement. Une chose demeure cependant: il y a une sorte de chimie entre nous, un désir réel de nous connaître, de nous faire mutuellement une place dans nos vies respectives. Honnêtement, je ne sais pas si ce sera possible. Je crois que la vie va chercher à nous séparer, comme elle tente de le faire avec Lola et moi.

Un effet secondaire de ces retrouvailles, c'est de m'avoir fait réalisé à quel point je suis esclave du beau temps. Nous n'avons pas souvent été à l'extérieur durant cet après-midi, et alors que je revenais chez moi, tout ce à quoi je pouvais penser, c'est qu'il était dommage d'avoir passé un si bel après-midi à l'intérieur.

Je me suis rattrapé hier. Il faisait si merveilleusement chaud, le soleil brillait de tous ses feux. Lorsque je suis allé sur le bord du lac pour faire ma première saucette de l'après-midi, j'ai été un peu surpris de voir ma voisine enceinte assise au bout de son quai, à lire un livre. Je n'ai pas l'habitude d'avoir des spectateurs lorsque je nage. Mais de son côté comme du mien, nous faisions comme si l'autre n'était pas là. Je crois que le fait que je sois nu crée nécessairement un malaise, autant de son côté que du mien. Qu'on le veuille ou non, la nudité n'est pas chose courante dans notre société, et les gens, même en faisant abstraction des préjugés qu'ils pourraient entretenir, ne savent pas vraiment comment réagir dans ce genre de situation. Seule la familiarité peut entraîner la nonchalance.

Mon cadeau de la semaine: ma chère petite Alegria adorée a pensé à moi cette semaine. Elle m'a laissé un beau message sur mon répondeur qui m'a fait chaud au coeur. Je la néglige, cette pauvre amie. Je n'ose pas trop la contacter ces temps-ci, avec son déménagement, la fin de ses cours, et tout ça. Peut-être interprète-t-elle mon silence comme un désir de m'isoler, de me ressourcer avec moi-même. Il est vrai que ma relation avec la solitude s'est beaucoup améliorée depuis quelque temps, mais je perçois cela davantage comme une libération que comme un besoin à satisfaire.

Quoi qu'il en soit, nous devrons nous voir bientôt. Il y a tant de choses que je veux partager avec elle.

L'eau de mon lac est si chaude maintenant que j'y tremperais pendant des heures, ne serait-ce de la crainte d'attirer l'attention d'une sangsue vagabonde. Elles sont très peu nombreuses, mais il ne faut quand même pas pousser sa chance trop loin. N'empêche que je me suis permis souvent durant les derniers jours de m'asseoir dans l'eau et de m'y détendre de longues minutes. J'ai alors constaté avec une certaine surprise comme les crapets-soleil sont des poissons audacieux. Après quelques secondes d'immobilité de ma part, ils revenaient vite prendre possession de leur territoire, se permettant même de de nager autour de moi et entre mes cuisses. Lorsque je leur présente ma main, certains ont même l'audace de mordiller mes doigts. C'est vraiment drôle de sentir ces petites bouches cartilagineuses "téter" mes doigts et mes orteils. Heureusement qu'ils n'ont pas de dents. Je ne me permettrais pas les mêmes fantaisies avec des brochets ou des maskinongés...

La nuit est si chaude, si douce. C'est exactement le genre de nuit pour prendre une marche complètement nu. Malheureusement, je suis confiné aux limites de mon terrain. Sinon je risquerais de me faire arrêter.


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