14 septembre 2002

Comment fais-je ?

Comment fais-je, alors que je n'aime pas la vie que je vis, que j'angoisse chaque jour à l'idée que ma vie s'écoule et se perd comme l'eau d'une gourde qui fuie en plein milieu du désert, alors que la solitude et l'isolement me pèsent un peu plus chaque jour, comment fais-je, dis-je, pour continuer à sourire, à faire le pitre, à me conter des blagues à moi-même et à en rire ?

C'est parce qu'au fond de moi, j'ai toujours été un boute-en-train. Les gens à mon travail le savent très bien d'ailleurs. Au fond de moi, j'aime blaguer et rire. Je n'aurais besoin de presque rien pour être heureux et me sentir comblé. Mais ce presque rien, je ne l'ai même pas.

N'empêche qu'une petite victoire, une toute petite victoire comme ce triomphe d'aujourd'hui sur cette pièce de frein de ma voiture qui me tenait tête depuis des semaines et dont je suis finalement venu à bout, est suffisante pour me ramener le sourire aux lèvres.

Pour combien de temps, je n'en sais rien. Mais j'en profite.

Je souffre d'une légère infection à une oreille depuis le début de la semaine. Rien de grave, je suis sujet à ça et ça m'arrive à tous les deux ou trois ans. Généralement, mon système immunitaire en vient à bout en un rien de temps, et ce sera encore le cas cette fois-ci. Cependant, cette infection me cause un désagréable acouphène dont je n'ai vraiment conscience que dans le silence total. Et ça me cause une légère angoisse. Ridicule, je sais, mais ça me ramène en mémoire les années où, quand j'étais enfant, je souffrais souvent d'otites (mon système immunitaire n'était pas à l'époque ce qu'il est aujourd'hui), et j'étais terrorisé par ces bruits et ces gargouillements qui surgissaient dans ma tête sans prévenir au milieu de la nuit, ces bruits terrifiants pour un gamin, et que je ne pouvais fuir d'aucune façon, ni en me cachant sous les couvertures, ni en me bouchant les oreilles.

Alors j'ai mal dormi cette semaine, me réveillant en pleine nuit, incapable de me rendormir à cause de cet acouphène que je cherchais à ignorer, à essayer d'oublier pour retrouver le sommeil. Je me rendais compte que, bien malgré moi, cela changeait légèrement mes habitudes. Je gardais toujours la télé allumée, je retardais pour toutes sortes de raisons l'heure de mon coucher, l'heure ou j'allais devoir éteindre télé et ordinateur et retomber dans le silence de la nuit.

Et cette petite angoisse, aussi insignifiante fusse-t-elle, déteignait malgré tout sur tous les aspects de ma vie et me la faisait voir de façon plus noire et plus angoissante.

Encore une preuve que, bien que j'aies toujours la tête hors de l'eau, j'arrive à peine à me tenir à flot, et qu'un rien suffit à me faire boire la tasse.

Et pour mal faire, la collègue avec qui je m'entend si bien était sur le terrain cette semaine. Je ne l'ai que brièvement vue en avant-midi lundi. Ça faisait du bien, après deux semaines.

Je suis vraiment trop attaché à cette femme.


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