20 juin 2005

Le problème avec le fait que je n'écris plus mon journal aussi souvent qu'avant, c'est que j'ai développé une sorte de paresse diaristique. Au tout début de ce journal, il arrivait relativement souvent que je n'avais rien à dire mais que, malgré tout, je ressentais le désir, voir le besoin, d'écrire quelque chose. Maintenant, il arrive beaucoup plus souvent que j'aie quelque chose à dire, mais que je me sente trop lâche pour me taper tout le rituel d'écriture, de correction, de publication, de notification des lecteurs...

Enfin. Ce soir, je transcende cette inertie.

Ça y est: depuis samedi dernier, je suis en vacance. Pour tout l'été. Je vous avais déjà dit que je m'étais prévalu d'un programme qui me permettait de m'accumuler des jours de congé en échange d'une baisse de salaire. Et bien le temps d'en profiter est maintenant arrivé. Je retourne au boulot après la fête du travail, début septembre.

Pour être franc, et même si ces dernières semaines j'anticipais ce moment avec beaucoup d'impatience, je ne suis pas encore capable de dire si ce que je ressens face à ce très long congé est positif ou négatif. Un peu des deux, sans doute, comme presque tout dans ma vie. Bien sûr, je n'ai plus d'heure pour me coucher le soir, je peux faire n'importe quoi n'importe quand sans avoir un horaire à respecter, je peux partir en voyage et en revenir quand je veux, j'ai tout un été pour finalement faire ma galerie et refaire ma toiture, et je pourrai sans restriction faire toutes les activités que j'aime: kayak, vélo, randonnée pédestre, camping, photographie, etc.

Mais le côté obscur de la Force, c'est que je vais littéralement passer les onze prochaines semaines à toute fin pratique seul. Combien de fois dans une année cela vous arrive-t-il de vivre une journée où vous ne prononcerez pas un seul mot entre le moment où vous vous levez le matin et celui où votre tête touche l'oreiller le soir venu ? Selon toute probabilité, ça ne vous est jamais arrivé une seule fois depuis des années.

Moi, quand je suis en vacances, ça m'arrive presque tous les jours.

Mais je vois venir cette longue période de solitude avec beaucoup moins d'appréhension que par les années passées, sans doute une conséquence de mon cheminement personnel, mêlé à une sorte de résignation. Il y a aussi le fait que j'ai beaucoup de choses et de projets pour me tenir occupé durant cette période.

Le plus triste dans tout ça, c'est qu'en ce qui concerne les gens que l'on considérerait d'un regard extérieur comme "mes amis", et bien je n'ai plus particulièrement envie de les voir. La réalité, c'est que les échanges les plus stimulants, je les vis maintenant avec un certain nombre de mes collègues de travail, et ce sont eux qui constituent maintenant l'essentiel de ma vie sociale.

Donc à toute fin pratique, pour les onze prochaines semaines, je n'aurai pas de vie sociale.

Le pire dans tout ça, c'est que, aux yeux de ces personnes, je ne suis qu'un simple collègue de travail, rien de plus. Leur véritable noyaux social, il est à l'extérieur du travail. Ils ont un cercle d'amis, des conjoints, des enfants, des familles. Il est difficile sinon impossible pour eux de s'imaginer qu'il puisse exister des gens comme moi qui, lorsque la journée au bureau est terminée, quittent le travail pour s'en retourner vers une maison vide ou personne ne les attend et où ils n'adresseront plus la parole à aucun autre être humain jusqu'au lendemain, ou au lundi suivant.

Comme je l'ai déjà dit par le passé, je compte un peu pour beaucoup de monde, mais beaucoup pour personne. Et ça ne sert même à rien de le dire, puisque justement, je ne compte pas assez pour que cela préoccupe vraiment qui que ce soit.


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