25 février 2007

J'ai eu de nombreuses conversations avec beaucoup de personnes ces dernières semaines. Que ce soit Copine, Lola, ou plusieurs de mes collègues de travail, le même point revenait souvent: Malgré mes sempiternelles récriminations contre la civilisation et l'humanité, je suis aujourd'hui de bien meilleure compagnie que je ne l'ai jamais été. Le changement s'est fait lentement, imperceptiblement, au fil des derniers mois. Mais il est bien réel. Trop de personnes me l'ont fait remarqué pour que ce soit uniquement le fruit de mon imagination.

Une grande partie de mon équipe de travail a récemment été relocalisée dans un autre édifice, au déplaisir de certains, mais aussi à la grande joie de d'autres (vous avais-je déjà parlé du climat de travail de plus en plus désagréable ?). Certaines de ces personnes sont mes collègues depuis plus de deux décennies. Cependant, contents ou non de partir, ils m'ont tous unanimement laissé savoir que leur plus grand regret dans ce déménagement sera de ne plus avoir l'opportunité de travailler avec moi et de me côtoyer au quotidien.

Inutile de préciser que cela m'a beaucoup touché, plus que je ne l'ai laissé paraître sans doute. Je n'ai pas l'habitude d'être apprécié. Professionnellement oui, un peu, mais personnellement, beaucoup moins.

Et je connais la raison de cela. C'est tout simplement parce que je me sens aujourd'hui mieux dans ma peau que je ne m'y suis jamais senti depuis très longtemps, peut-être depuis ma plus tendre enfance.

Et je sais aussi quand tout cela a commencé. Ça a commencé il y a deux ans environ. Quand j'ai choisi de voir le monde tel qu'il est. Quand j'ai arrêté de me dire que ce que j'y voyais était impossible, parce que depuis ma plus tendre enfance c'est ce que tout le monde me répétait sans cesse. Quand j'en suis finalement venu à la réalisation que presque tout ce que j'avais intuitivement perçu toute ma vie était bien réel, que je n'étais pas fou, cinglé, parano, mythomane, anormal.

Enfin anormal, oui, mais dans le sens de "en dehors de la norme", pas dans le sens de "psychologiquement défectueux".

Bien sûr, cette prise de conscience a été suivie par une période de désillusion, de révolte, de rage, de ressentiment. Et je ne crois pas que cette période soit tout à fait terminée, ni qu'elle le sera un jour. Peut-on pardonner à toute une société qui, toute notre vie durant, nous a toujours envoyé le message qu'il y avait quelque chose qui clochait horriblement en nous ? Il le faudra bien un jour, si j'espère atteindre sinon le bonheur, au moins la paix intérieure. Le pardon est un choix, après tout.

Aujourd'hui, je me sens bien dans ma peau. Mal dans le monde qui m'entoure peut-être, mais ça c'est tout à fait normal. Je le sais maintenant. Malheureux ? Non, plus maintenant. Heureux ? Peut-être pas encore, mais certainement plus près du bonheur que je ne l'ai jamais été.

Suis-je encore convaincu que le bonheur et la lucidité sont incompatibles ? Plus autant qu'avant. Mais qu'ils le soient ou non, la lucidité est là pour rester.


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