3 novembre 2007

Comme il fallait s'y attendre, les castors me font encore des misères cet automne. Non seulement se sont-ils encore attaqués aux arbres qu'ils avaient déjà passablement amochés les années précédentes, mais ils en ont coupé un auquel ils n'avaient jamais touché avant, et qui pour mal faire est tombé sur mon canot. Inutile de dire que j'étais furieux quand j'ai vu ça. Et le pire c'est qu'il l'ont laissé sur place, se contentant de couper les branches qui dépassaient. Heureusement que les dommages ne sont pas trop important.

Cet après-midi, je suis retourné sur le bord du lac pour constater que non seulement ils avaient cette fois emporté le reste de l'arbre qu'ils avaient coupé la dernière fois, ils étaient en plus partis avec deux autres petits arbustes qui me donnaient de l'intimité quand je me faisais bronzer dans la cour. Ils deviennent de plus en plus audacieux, ou de plus en plus désespérés.

Ils commencent sérieusement à me tomber sur les nerfs, les gros rats à queue plate.


J'arrive justement du bord du lac, avec ma lampe frontale sur la tête. Comme je m'y attendais, il y avait un castor qui nageait non loin de la rive. Il a plongé en donnant un grand coup de queue dans l'eau dès qu'il m'a vu arriver. Puis, il s'est mis à nager de long en large le long de la rive, tiraillé entre la peur et la curiosité.

Par sa taille, je pouvais voir que c'est un jeune castor. Assez vieux pour partir se faire une vie à lui, mais encore assez jeune pour ne pas avoir perdu sa curiosité juvénile. Il était seul, ce qui m'a plutôt surpris. J'ai l'habitude de voir des familles complètes venir saccager ma berge de lac. En nageant comme il le faisait, il se rapprochait toujours un peu plus de la berge avec chaque passage. Quand il était aussi près que sa prudence le laisserait approcher, il s'immobilisait presque complètement dans l'eau, me faisant face, semblant m'examiner, m'étudier, évaluant sans doute le risque qu'il courrait s'il choisissait de regrimper sur la berge malgré ma présence. Si je faisais un mouvement brusque, il plongeait soudainement en claquant de la queue pour ré-émerger plus loin, et recommencer son manège de nage de long en large en se rapprochant un peu à chaque passage.

Finalement, je me suis lassé et je suis parti. Après tout, c'est son domaine, pas le mien. Il nage toute la nuit, chaque nuit, dans une eau dans laquelle je mourrais d'hypothermie en quelques minutes. Il coupe des arbustes qui sont là depuis plus longtemps que moi, qui repousseront, et qui seront encore là longtemps après ma mort.

J'ai beau me croire bien naïvement propriétaire des lieux, c'est son domaine. Son univers.


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