1 juillet 2008

Fait quelques petites crises d'angoisse ces derniers jours. Ça m'arrivait la plupart du temps durant les journées pluvieuses où je n'avais rien à faire et je commençais à m'ennuyer. J'ai alors l'impression de me retrouver devant un mur, devant une situation sans issue. C'était ainsi que je me sentais durant mes deux dépressions, alors il est normal que ce genre de sentiment fasse naître en moi la peur de retomber dans cet état d'esprit.

Mais l'avantage d'avoir fait, et de s'être sorti, de deux dépressions, c'est qu'on comprend beaucoup mieux ses mécanismes émotionnels. Je sais, maintenant, que cet état n'est pas permanent. En fait, si je me fis à ce journal et à mes souvenirs, je passe une petite période de ce genre à chaque fois que je tombe en vacance au début de l'été. Ça dure quelques jours et puis ça passe, une fois que je suis passé à travers mon sevrage.

Et puis il faut dire que je ne m'aide pas non plus, à rester enfermé ici des journées entières. Avant-hier, j'ai utilisé mon remède miracle: J'ai roulé. Des kilomètres et des kilomètres, à simplement rouler, sans destination, sans but précis. Juste pour me sentir libre. Juste pour me rappeler que la planète est immense et qu'une vie ne suffira jamais à la parcourir. Et puis ce soir, je n'ai fais qu'une simple marche vers la boîte à malle pour aller chercher mon courrier, mais ce simple geste m'a fait un bien immense. Autant à cause de l'exercice, que du simple fait de m'approprier mon quartier, de revendiquer le droit d'en arpenter les rues, comme le font tant d'autres personnes. C'est un droit, je dois bien l'admettre, dont je ne me suis pas souvent prévalu, même après seize ans ici.

Ces derniers jours ça va bien. Je me suis encore ennuyé mais je n'angoisse plus à cause de ça. Le sevrage est fait, le tout dernier sevrage de ce genre de ma vie, car je ne retournerai plus jamais sur le marché du travail.

Je commence seulement à réaliser que désormais, cet édifice que j'ai fréquenté plus longtemps que j'habite ici, où j'ai travaillé pendant la moitié de ma vie, dont j'avais presque fais un deuxième chez moi, ne m'est désormais plus accessible. C'est fini maintenant, je n'y ai plus ma place.

Si le beau temps peut finir par s'installer, je pourrai peut-être finalement entreprendre les rénovations de ma maison. Ça risque de me tenir occupé pendant plusieurs mois, au moins jusqu'aux premières neiges l'automne prochain.

Malgré les deux derniers jours de beau temps, aucune autre fourmi ne s'est pointé chez moi. Je les vois bien aller et venir dehors, mais il semble qu'elles aient abandonné la route qui les conduisait dans la maison, comme je l'espérais. Touchons du bois pour que ça continue.

Il semble que j'aie raté la montée printanière des meuniers cette année. Faut dire que je n'ai presque pas fait de canot ce mois ci, à cause du temps. Hier soir, j'ai bien vue quelques cadavres au fond de l'eau dans la source du lac, mais aucune trace de poissons vivants. Il ne faudra pas que j'oublie demain d'aller voir à pied plus haut dans le ruisseau si je vois des masses d'oeufs dans les bassins d'eau calme. Le problème, c'est qu'il n'y a pas beaucoup d'eau calme nulle part ces temps-ci, à part dans le lac lui-même. Il a tellement plu ces dernières semaines que tous les petits courts d'eau de montagne de mon coin sont gonflés comme au printemps. Ça fait quand même un son agréable pour s'endormir le soir. Ça remplace le chant des grenouilles qui, elles, en ont fini pour cette année.

Et pour finir, samedi dernier, j'ai eu le plaisir de voir apparaître les petites marmottes de cette année ! À ma grande surprise, elles sont apparues sous la galerie de mes voisins, au même endroit que l'an dernier, dans le terrier que je croyais que leur mère avait abandonné. De toute évidence, elle a décidé d'en reprendre possession, jugeant en fin de compte l'endroit idéal pour y avoir sa couvée. Je ne les ai pas vu dimanche à cause de la pluie, mais elles sont brièvement réapparues lundi, sans jamais s'éloigner de l'entrée du terrier cependant. Je les ai vu ce matin également, et cette fois certaines d'entre elles avaient osé s'aventurer à la limite de mon terrain. Elles ont fuit dès que je suis sorti de chez moi. Elles me semblent beaucoup plus peureuses que celles de l'an dernier. Celle-là, je pouvais les approcher jusqu'à presque pouvoir les prendre dans mes mains, du moins durant les premiers jours. Je ne pourrais en dire le nombre exact, mais je sais avec certitude qu'elles sont au moins quatre.

Je me demande quelle âge peut avoir leur mère, et combien de couvée elle aura encore. Quoi qu'il en soit, en ce qui me concerne, ce sera la dernière couvée que je verrai, puisque l'an prochain à cette date, je ne serai plus ici.


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