17 octobre 2009

Je suis retourné cette semaine à l'endroit où j'ai perdu mon GPS. Je n'étais plus retourné marcher depuis mon dernier billet de toute façon et j'avais besoin de sortir d'ici. Je savais bien que mes chances de le retrouver étaient infimes, mais je m'en serais voulu de ne pas faire au moins une tentative avant l'arrivée de la neige.

J'ai passé tout un avant-midi à parcourir à plusieurs reprises, aller et retour, les deux kilomètres de rive de rivière que j'avais parcouru entre ma descente de la falaise et le moment où j'ai réalisé que mon appareil avait disparu. C'est une fois arrivé sur place que j'ai pleinement réalisé à quel point mes chances étaient minces. La berge et le sous-bois étaient littéralement parsemés de sentiers d'animaux qui courraient parallèlement les uns aux autres ou s'entrecroisaient en tout sens. Impossible de savoir quel chemin exact j'avais bien pu utiliser la dernière fois, d'autant plus que le paysage paraissait très différent entre la pénombre et le plein soleil. Et pour compliquer les choses, les arbres s'étaient depuis dégarnis, couvrant complètement le sol d'une épaisse couche de feuilles mortes qui n'était pas là il y a trois semaines.

Bref, comme vous vous en doutez, j'ai eu beau prendre bien mon temps, parcourir plusieurs trajets différents et me concentrer tout particulièrement sur les endroits comme les pentes raides, les bosquets d'arbustes et les fossés qui m'obligeaient à des manoeuvres et des contorsions qui ont probablement été la cause du détachement de mon GPS de son attache, j'ai lamentablement échoué dans ma tentative de le retrouver. Tant pis. Les cinq cent dollars que je devrai débourser pour en acquérir un autre me rappelleront de ne plus faire montre d'une telle imprudence à l'avenir.

Dans le même ordre d'idée, je me suis négligé sur le plan activité physique ces dernières semaines. Je m'étais pourtant promis cette année que ça n'arriverait pas. Mais ma haine viscérale du froid est très profondément ancrée en moi, et c'est difficile de trouver la motivation pour mettre le nez dehors lorsque je jette un coup d'oeil sur le thermomètre, et ce même si un soleil magnifique brille dehors presqu'à tous les jours.

Et puis il n'y a pas que le froid qui m'ôte l'envie de sortir de chez moi. Il y a aussi mes nouveaux voisins. Pas qu'ils soient pire que n'importe quel voisin moyen, mais ils sont là, alors que pendant quatre ans il n'y avait personne. Et en plus, ils sont là tout le temps. Je ne sais pas exactement ce qu'ils font dans la vie, mais soit qu'ils ont pris de très longues vacances, soit qu'ils travaillent à domicile, parce que la seule personne qui parte de chez eux régulièrement tous les jours est leur petite fille lorsqu'elle quitte pour l'école. Quant à eux, ils ne font que faire des aller-retour avec leur véhicule, et travailler sur leur terrain. Et pour couronner le tout, ce sont apparemment de grands amateurs de ces crisses de machines infernales que sont les souffleuses à feuille. Ça me rend dingue.

À plusieurs reprises, ces dernières semaines en fin d'après-midi, alors que le vent tombait, j'aurais été tenté de sortir d'ici, prendre mon kayak, et aller pagayer vers le marais pour m'enquérir de l'état de la flore et de la faune en cette période de l'année. Mais qu'est-ce que ça m'aurait donné ? Tout ce que j'aurais entendu, c'aurait été le bruit infernal de cette crisse de câlisse de tabarnak d'ostie de machine de merde, qu'ils sortent à tous les jours, plusieurs fois par jour, apparemment plus pour le plaisir de s'amuser avec leur joujou que pour ramasser les deux ou trois feuilles qui sont tombés depuis la dernière fois qu'ils l'ont utilisé. Moi aussi j'aime bien m'amuser avec mes joujoux. Mais ils ne font pas de bruit, mes joujoux. Et je n'écoeure pas tout le quartier lorsque je m'en sers.

Encore aujourd'hui, non seulement j'ai encore dû endurer le son insupportable de cette machine tout l'avant-midi, mais en plus mon cher voisin a cru bon d'y ajouter une bonne demi-heure de scie à chaîne !

Ça ne fait plus aucun doute maintenant et je ne peux plus échapper à cette réalité qui est la mienne depuis ma plus tendre enfance et ce, même si j'ai essayé de la nier pendant des décennies: Je ne suis tout simplement pas fait pour vivre en société, plus précisément dans notre société telle qu'elle existe dans le monde occidental d'aujourd'hui. Le problème, c'est que même si je trouvais la terre de mes rêves demain matin, il y a peu de chances que j'aie le temps de résoudre tous les problèmes de logistique et de me construire quelque chose d'habitable avant la saison froide. Donc, je vais encore passer un autre hiver ici.

Mais même une terre à bois non loin d'ici ne suffira pas. Il me faudra en plus quelque chose d'autre, quelque chose de vraiment isolé, reculé, loin de tout; un sanctuaire où je pourrai aller me ressourcer quand j'en aurai besoin, un endroit où j'aurai la garantie d'être le seul être humain à des kilomètres à la ronde. Mais on verra ça plus tard, quand je me serai installé ailleurs, que je pourrai enfin vendre la maison et que j'aurai ainsi plus de liquidité à ma disposition.

D'ici là, et bien je vais devoir continuer à faire ce que je fais depuis que mes nouveaux voisins sont arrivés: Alterner entre m'enfermer ici, ou aller me perdre complètement quelque part en forêt, parce que je n'arrive tout simplement plus à prendre plaisir à profiter de mon petit environnement immédiat.


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