La cohésion sémantique entre plusieurs passages de divers volumes des Rougon-Macquart s'établit grâce à un faisceau d'isotopies. Il repose sur le groupement de sèmes spécifiques actualisés à proximité du sémème vedette indexé au sème générique inhérent /astronomie/ : /feu/ + /éclairement/ + /rouge/ + /doré/ (soleil éclatant sur fond bleu) + /expansion/ + /liquide/ (actualisés dans les rayonnements aussi bien montants que descendants, mais encore dans les "torrents de lave" de "volcan" et autres épanchements, dont les sentimentaux associés) + /euphorie/ + /merveilleux/ (cf. les lexicalisations de l'éblouissement prodigieux) + /sacralité/ (païenne autant que chrétienne; cf. les "vases sacrés", mais aussi le "rang de perles" et autres "paillettes", sans parler du prestigieux coloris de la pourpre et l'or qui induisent le sème générique /parure précieuse et festive/, lequel est aussitôt spiritualisé par l'émotion et le merveilleux qui sous-tendent cette vision de la nature) + /vie naissante/ (printemps, fécondité, éclats de sang, etc., le spectacle céleste étant couplé à la fertilité). Cela induit le sème aspectuel /inchoatif/ contrebalancé par /cessatif/ des couchants (paraphrasé par exemple par "l'astre disparu déjà"), plus nombreux que les levers de soleil. Or cette paire est moins perceptible en contexte que l'isotopie /continuité/ (notamment de l'allongement de la queue-chevelure, dont l'imperfectivité est compatible avec l'incendie - ce mot de "queue(s)" traînante est systématiquement employé avec comète), au détriment de son contraire /discontinuité/ qui est à la base de l'intermittence du phénomène. En outre la dominante /itératif-duratif/ des imparfaits descriptifs augmente la saillance de la continuité du phénomène contemplé, en même temps qu'elle en dissipe le côté fugace et passager.

Molécule sémique identifiée par le réseau associatif de sémèmes ainsi corrélés au mot vedette. La gageure consiste à unifier des lexicalisations aussi diverses qu'en relation de paraphrase - art par lequel un nouveau paysage est ainsi chaque fois repeint -, à tel point que d'un passage à l'autre que le lecteur a l'impression que l'auteur effectue un auto-pastiche. Pour exemple, comment expliquer sinon par la permanence d'un faisceau d'isotopies sous-jacent que l'auteur passe de "pluie d'étoiles" à "poussière d'or" via "pluie de braise", "fusée d'or" et autres "gerbes d'étincelles", autant de syntagmes corrélés à comète, dont ils lexicalisent des composants ? Si l'on comprend le lien avec le "criblage de flèches d'or" et la fusion en "lingot", la douceur et la chaleur sont étrangères aux phénomènes météos "neige" et "ouragan" pourtant associés au flamboiement : pareille décontextualisation de syntagmes répétés impliquent ainsi le niveau herméneutique textuel, qui produit la cohésion sémantique, et répond ainsi à la curiosité que suscitent des co-occurrents aparemment sans rapport. La difficulté réside dans le fait qu'une fois que l'on a commencé à dérouler le fil des corrélations, il semble impossible de s'arrêter dans un corpus aussi riche de répétitions que celui de Zola - fidèle en cela à la technique wagnérienne du leitmotiv. Quel que soit le perpétuel changement de contextes que l'enquête implique, il n'empêche heureusement pas de repérer la récurrence des sèmes stabilisés au sein d'une molécule sémique. La question psychologique du caractère conscient de telles recontextualisations ne se pose pas (comment savoir si l'auteur les avait calculées ?). Elle n'a en tout cas pas à légitimer l'enquête lexico-sémantique menée par le lecteur.