Déclics d'oreille et évidences d' harmonie

 
Improviser, arranger, composer tous styles nécessite une habitude d'oreille particulière, insoupçonnée du grand public comme de trop nombreux musiciens:

L'oreille habituelle, spontanée, est linéaire. Cela signifie que l'oreille suit l'instrument principal (soliste, voix), et entend l'orchestre qui fait la sauce autour ou en arrière de la mélodie.

Cette oreille est suffisante tant que l'on joue des styles de musique dans lesquelles la mélodie est fixe, car le musicien se base alors sur son déroulement (oreille linéaire). Elle ne l'est plus lorsqu'on aborde le jazz ou les improvisations, puisque la mélodie est soit transformée soit absente...

Il s'agit donc d'une oreille structurelle: on écoute la grille, les structures du morceau, sa construction harmonique, et la façon dont chaque instrument (chaque musicien) de l'orchestre utilise les moments qui passent.

Acquérir ce type d'oreille est assez long et, surtout, très aléatoire (facilités d'oreille, instrument, styles de musique joués, jeu en groupe ou en solitaire, etc...) En même temps c'est ce qui fait la différence entre l'instrumentiste et le musicien, ce dernier décidant (avec + ou - de bonheur:)) de ses parties instrumentales.

C'est aussi ce qui fait la différence entre un improvisateur, objectivant son chant intérieur sur l'instrument et l'opiniâtre apprenti-musicien appliquant ses gammes (avec + ou - de bonheur également, mais plutôt moins:))
sur les accords qui passent.
 
 

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Cette oreille, dont je disais plus haut qu'elle n'était pas nécessaire pour jouer des musiques à mélodie fixe, n'en est pas moins fort utile au musicien, car ces codes y sont présents et sont même sous-jacents à la composition du morceau, de façon simple ou plus élaborée. C'est pour cela que l'apprentissage du jazz parait difficile, c'est pour cela aussi que les musiciens de jazz sont souvent facilement à l'aise dans les autres musiques: ils en entendent les repères.

L'apprentissage des caractéristiques de style n'est qu'une façon "d'improviser autrement"

Un pianiste ou un guitariste (rythmique et polyphonique) auront la possibilité de développer ces façons d'entrendre, les bassistes également; c'est plus aléatoire pour les instruments  monophoniques. Les batteurs sont encore moins favorisés puisque, n'ayant jamais à faire avec l'harmonie ni les notes, leur oreille n'est guère incitée à en discerner les repères.

Avec les années qui passent on joue mieux en mesure,on repère la tonalité, puis l'anatole, puis... il s'agit donc bien d'un apprentissage, à force de ... plein de choses.

Tout le monde peut entendre un son dans sa tête, un musicien a appris à en entendre plusieurs, les organiser, leur attribuer des timbres et des volumes.

Alors comment faire ? Eh bien c'est pour cela qu'il faut tourner; des grilles (en tant que rythmique); en groupe ou en atelier c'est encore mieux : l'exigence de solidité est plus forte, et les erreurs de concept deviennent plus évidentes.

C'est aussi pour cela que l'on conseille à tous les instrumentistes de jouer un peu de piano et/ou de guitare : quand on revient sur son instrument les idées sont plus claires et les progrès évidents. Dans ce cas il ne s'agit pas d'apprendre à être vraiment guitariste ou pianiste, mais d'apprendre à réfléchir et à entendre.

Mon rôle d'enseignant consiste à amener directement les éléments nécessaires à cette évolution, et à m'assurer de leur acquisition en réflexes de pensée similaires à ceux que l'on constate chez les improvisateurs confirmés.

Raphaël Le Tac
 

Cours particuliers à Paris 75018
 

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D.Lockwood, réflexions sur l'oreille et l'improvisation

M.Martenot et l'oreille