Le début de la nuit fut insupportable : chaud et lourd, sans le moindre mouvement d'air. Mais heureusement le vent s'est remis à souffler ; car une autre particularité de cette région est ce vent presque incessant. Le lac représente un immense couloir entre les montagnes dans lequel le vent peut s'engouffrer et se développer. Il en résulte un bruit tout aussi permanent : dans l'oasis, lorsqu'il passe au travers des palmes, celles-ci s'agitent et se frôlent sans cesse et donc bruissent de même.

La traversée pour l'île se faisait autrefois sur de très frêles pirogues à rame pilotées par des El Molo, malgré les crocodiles, mais ceux ci étant suffisamment nourris, cela ne représentait pas de risques particuliers. Aujourd'hui la barque à moteur en plastique et fibre de verre remplace avantageusement les pirogues ancestrales. En arrivant sur l'île, quelques El Molo sont là à faire sécher une grande quantité de poisson au soleil. Ce peuple vit essentiellement sur deux petites îles du lac Turkana ; ils ne sont plus que 500 individus environ.

Par contre nous en sommes pour nos frais au niveau des crocodiles : nous montons sur la colline surplombant la grève en silence, pour ne pas les effrayer et les faire se précipiter sous l'eau protectrice du lac, mais les reptiles ne sont pas regroupés sur la rive comme cela leur arrive souvent le matin. Peut-être fait-il déjà trop chaud. Quelques uns apparaissent de temps à autre à la surface du lac mais sans plus. On ne peut avoir de la chance tous les jours !

Ce matin nous partons visiter l'île aux crocodiles. Ils sont assez nombreux dans le lac. Ce dernier est en effet très riche en plancton et donc en poissons qui offrent une importante nourriture aux crocodiles qui se développent et se reproduisent rapidement. Ces nombreux poissons permettent également aux habitants de la région, et plus particulièrement aux El Molo, de pêcher et donc de survivre dans ce milieu.