26 septembre 2000

J'ai si bien réussi à gérer mon angoisse aujourd'hui que j'ai eu droit à une brève rémission. En fin d'après-midi, je me sentais presque bien, ce qui m'a enfin permis de savourer pleinement le spectacle du feuillage d'automne dans les montagnes, illuminé par la chaude lumière orangée d'un soleil couchant suspendu juste au dessus de l'horizon.

Je ne sais trop si c'est par courage ou par folie, mais j'ai expérimenté sur moi-même en arrivant ici. J'ai consciemment essayé de me rappeler du moment précis, il y a trois semaines, où mon angoisse est réapparue. Et comme de raison, dès que ce souvenir a refais surface dans ma mémoire, j'ai immédiatement ressenti ce noeud dans la gorge, accompagné de cette peur angoissante et incontrôlée de je ne sais quoi.

Voilà. Je fais du progrès. J'ai trouvé la switch "on", mais pas encore la switch "off".

J'ai identifié une composante de cette peur. C'est la peur de l'ennuie. La peur d'être condamné jusqu'à la fin de mes jours à toujours chercher d'un moment à l'autre quelque chose à faire. Peur de me blaser progressivement de tout ce qui me passionne présentement, et de ne rien trouver d'autre pour les remplacer. Ouf.... je dois certainement avoir mis le doigt sur une grosse partie du bobo, car juste à écrire ces lignes, je sens ma gorge se serrer... c'est pas facile d'expérimenter sur soi-même, d'être son propre cobaye. C'est sans doute un avant-goût de ce que ça risque d'être lorsque mon futur psychologue me tripotera l'esprit pour exposer au grand jour toutes mes peurs, mes angoisses, mes frustrations enfouies au plus profond de mon inconscient.

Ça promet...

Parlant de psychologue, il faudrait bien que je me grouille le cul...

Je crois aussi savoir pourquoi je néglige tout dans ma maison: ménage, vaisselle, aquarium, plantes. Chaque fois que je veux m'adonner à l'une de ces tâches, c'est parce que je n'ai rien d'autre à faire. On dirait donc que chaque fois que je veux m'y mettre, je perçois cela comme une abdication, une obligation d'avouer que je n'ai rien à faire, ce que je refuse d'admettre. Et vous voulez savoir le pire ? Je m'occupe assidûment des plantes dans la salle à dîner à mon travail. Je les arrose, j'enlève les feuilles mortes, etc.

Méchant foqué le gars hein ?

C'est presque inquiétant de voir à quel point, malgré ma souffrance, je n'ai que peu de scrupule à expérimenter sur moi-même pour satisfaire ma curiosité intellectuelle.

Bon, encore une chose qui m'inquiète.

Et ce n'est pas la dernière. Et non.

Je n'ose imaginer ce que cet état d'angoisse quasi-permanent du matin au soir fait à mon corps. Ça ne doit certainement pas être bon pour la santé.

Heureusement pour moi, il semble que mon sommeil ne soit absolument pas affecté. Ni mes rêves d'ailleurs. Tout ceci commence à me faire douter que ce que je vis soit réellement une dépression. Mais il y a plusieurs formes de dépression. Et puis merde, je ne suis pas un psychologue, et quel importance cela peut-il avoir de donner un nom à sa souffrance.

Bon. La fatigue est en train de me faire oublier mon mal. Bonne chose.


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