29 avril 2001

J'ai joint l'utile à l'agréable aujourd'hui. J'ai fait mon impôt, confortablement assis sur une couverture de laine sur ma galerie, afin de profiter pleinement de cette magnifique journée ensoleillée. Bien sûr, au moment où le soleil était à son plus haut dans le ciel, je n'ai pu résister à l'envie de me dévêtir de cette lourde robe de chambre qui empêchait les doux rayons de venir caresser ma peau. J'ai fait une petite pause d'une heure environ, question de jouir pleinement de cette expérience et de reposer mon pauvre cerveau qui n'en avait que faire de tous ces chiffres. Je suis resté dans la même tenue pour reprendre mon travail, ce qui a semblé amuser mes voisins, et ce jusqu'à ce que la fraîcheur grandissante de la journée qui avançait m'oblige finalement à me rhabiller.

D'ailleurs les distractions ne manquaient pas pour me déconcentrer de mon travail. La nature s'éveille lentement ces temps-ci, et je ne suis pas le seul à en profiter. Les canards aussi s'en donnaient à coeur joie dans le lac. Et bien sûr, ce qui est presque inévitable un dimanche après-midi en milieu rural, les "chain-saws" faisaient entendre au loin leur son peu mélodieux...

Mais le clou de la journée fut sans doute ce martin-pêcheur qui, jeune ou inexpérimenté je ne saurais dire (ou peut-être tout simplement malchanceux), passa une bonne partie de l'après-midi à plonger à grand fracas dans le lac pour en ressortir bredouille, et probablement aussi de plus en plus frustré, ce qu'il laissait clairement entendre par ses cris après chaque tentative infructueuse.

Quelle ne fut pas ma surprise, ma joie et mon émerveillement, en fin d'après-midi, de le voir finalement sortir de l'eau, après un autre de ses spectaculaires plongeons, arborant fièrement dans son bec un petit poisson frétillant. Perché sur une branche au fond de ma cour, à une trentaine de mètres de ma galerie, j'ai pu l'observer attentivement alors que, pendant un bon cinq minutes au moins, il frappa systématiquement sa proie sur la branche lui servant de perchoir, pour l'assommer et/ou l'attendrir, et ce avec un claquement si fort que je pouvais l'entendre très clairement de là où j'étais. Lorsqu'il fut raisonnablement convaincu que sa proie était morte, il l'avala d'un trait, tête la première, avant de s'essuyer le bec sur la branche et de repartir en direction du lac, où je le perdis finalement de vue.

Ce soir, je suis sorti au crépuscule, dans cet air grandement refroidi, mais dont la fraîcheur humide remplissait mes poumons de bien-être à chaque inspiration. J'ai marché pendant environ une heure pour aller poster mes rapports d'impôt. Je faisais plus souvent ce genre de marche les premières années où je suis arrivé ici. Je m'en suis lassé avec le temps, je me demande bien pourquoi. Probablement un indice de mon état d'esprit qui commençait déjà à se détériorer à cette époque. Quoi qu'il en soit, j'ai renoué ce soir avec ce genre de petit plaisir bien anodin, mais combien agréable, surtout qu'à cette période de l'année l'expérience n'est pas gâchée par des hordes de maringouins vampiriques...

À part les aboiements des quelques chiens des environs chez qui ma présence déclenchait un crise de délire territorial typiquement canin, le seul son qui parvenait à mes oreilles était le chant des nombreuses sources qui descendent des montagnes et croisent les rues de mon quartier en plusieurs endroit, la moindre n'étant pas le ruisseau qui alimente le lac. Toutes gonflées qu'elles sont par la fonte des neiges printanières, c'est toujours pour moi un grand plaisir d'écouter couler leurs eaux vers le lac, comme si elles cherchaient à rattraper le retard pris durant la saison froide alors qu'elles étaient prisonnières des glaces hivernales.

Tout ça pour dire que je me sens libéré d'un grand poids ce soir. Mon impôt est réglé, de même que mon contrat chez mes clients (je devrai simplement aller y faire un tour demain matin pour confirmer que tout fonctionne). Quand à mon travail à temps plein, j'ai bien l'intention de prendre quelques jours de congé pour décompresser un peu. C'est maintenant confirmé, je vais amener Cousine et son conjoint à Montréal demain, afin qu'il puisse prendre leur avion pour l'Europe mardi. Au programme, souper avec Nikita (!) dans un bon resto. Puis j'aurai le choix d'aller coucher soit chez elle (avec Lolita et CaroLargo, yé !), soit chez Hôtesse, cette (extrêmement) jolie demoiselle qui nous avaient hébergé Cousine et moi lors de son premier départ pour l'Europe il y a cinq mois.

Bien du bon temps en perspective, et une détente bien méritée...

Je sens que je vais bien dormir cette nuit :-)


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