QUELQUES PROPOSITIONS AUX RESPONSABLES ADMINISTRATIFS DU C.N.R.S.

Le lecteur qui aurait du mal à discerner de quels responsables administratifs il s'agit ici est prié de réviser rapidement le chapitre 1. En parallèle, je ne saurais trop lui conseiller de lire un petit bouquin roboratif de Pierre Joliot (biophysicien spécialiste de photosynthèse et accessoirement petit-fils de Pierre et Marie Curie et fils de Frédéric et Irène Joliot-Curie), La Recherche passionnément, éd. Odile Jacob, 2001, dans lequel il fait quelques constats assez en phase avec les miens – c'est toujours rassurant de sentir que l'on n'est pas tout seul.

Commencer à considérer les chercheurs comme des adultes :

L'âge moyen des agents du CNRS a tendance à augmenter. Cassandre aurait ajouté : dangereusement. Avec l'âge et les petits maux qui l'accompagnent, on devient moins malléable, le mauvais caractère s'installe et on n'avale plus n'importe quoi. On pouvait utiliser d'autres régimes lorsque les laboratoires étaient peuplés de gens de trente ans. Ce n'est, hélas, plus le cas. Il faut donc que le CNRS s'y adapte, faute de quoi un certain nombre de chercheurs risquent fort de ne plus faire confiance du tout à leur organisme, et d'adopter des comportements de plus en plus incontrôlables (le lecteur est prié de trouver l'euphémisme caché dans cette phrase).

A moins de considérer que les chercheurs sont tous irresponsables par définition et par construction, il serait urgent de remplacer le sacro-saint principe du contrôle a priori par un contrôle a posteriori. Mais une telle proposition est vraisemblablement saugrenue dans un pays qui oscille constamment entre la fantaisie latine, le flegme anglo-saxon, et la rigueur germanique. Comment choisir, en effet, entre les charmes du système D et le respect des règles librement acceptées même si elles sont quelque peu contraignantes ?

Cesser d'utiliser la langue de bois :

Les vertus de la langue de bois sont bien connues : administrée au citoyen, elle permet d’éviter les débats indésirables. Dans le milieu de la recherche, elle permet d’échapper aux confrontations entre partisans et opposants de ceci et de cela. Le résultat est évidemment désastreux : la complexité des problèmes s’accroît, leur compréhension se brouille, l’inintelligibilité s’installe, la légitimité des règles recule et le scepticisme progresse.

Devant la complexité du sujet, je me contenterai ici de donner quelques exemples frappants de phrases, expressions et déclarations lues et entendues. Alternant entre vérité et mensonge ou amalgamant l’un à l’autre, certaines sont vénielles. D'autres constituent des monuments d'hypocrisie ou sont le témoignage de profondes contradictions. Même hors de leur contexte, elles nous interpellent. Le jeu consiste à se rappeler qui a bien pu en être l'auteur, en quelle circonstance, et pourquoi elles méritent de figurer ici. Alors apparaîtra pleinement leur caractère fortement comique, lié tantôt au non-dit qu'elles contiennent, tantôt au fait qu'elles sont démenties – ou parfois corroborées – par l'expérience quotidienne de chacun :

·         Un laboratoire du CNRS ne doit pas se livrer à des activités de service.

·         On ne doit faire que du fondamental.

·         La recherche opère une sélection naturelle par la résistance et la passion. Ce système n'encourage ni l'originalité ni l'épanouissement personnel.

·         Il y a beaucoup trop de gens qui font de la recherche appliquée non applicable.

·         La consultance est une prestation purement intellectuelle.

·         Un brevet est équivalent à une publication.

·         Faire de la valorisation est payant pour un chercheur (un peu ambigu car on ne dit pas qui va payer).

·         Si la valorisation a perdu le nord c'est que quelqu'un a cassé la boussole.

·         Les grands groupes industriels n'ont aucun intérêt à ce que le CNRS ait une politique de valorisation efficace.

·         Les inventions faites par les chercheurs dans le cadre de leur mission appartiennent au CNRS.

·         Le pourcentage des redevances que le CNRS reverse aux inventeurs et aux laboratoires est très motivant.

·         La fonction du chercheur est de chercher et non de trouver.

·         Des chercheurs qui cherchent, on en trouve ; des chercheurs qui trouvent, on en cherche.

·         Les directeurs passent, les chercheurs restent.

·         Les ITA ne sont pas là pour penser.

·         Les ITA font un complexe par rapport aux chercheurs.

·         Au prochain budget, les moyens des laboratoires seront augmentés (sur l'air de : demain on rase gratis).

·         Ne pas confondre budget primitif et moyens réels (sur le même air).

·         Les laboratoires n'ont aucun intérêt à cacher l'existence de certains contrats.

·         Il est interdit, pour les UPR, de faire gérer des contrats par des associations du type loi 1901.

·         Le Comité Scientifique est satisfait des résultats de ce laboratoire.

·         Le CNRS est conscient de l'importance d'une bonne gestion de ses ressources humaines.

·         Le CNRS n'est pas bien armé pour gérer les idées nouvelles.

·         Le CNRS favorise les recherches interdisciplinaires.

·         Le CNRS ne fait rien pour favoriser les recherches interdisciplinaires.

·         Le CNRS a pour politique de ne pas participer à des associations "Loi 1901".

·         Dans l'administration, il n'y a pas que des bons à rien ; il y a aussi des mauvais en tout.

·         Le statut du CNRS est celui d'une Société Anonyme à Irresponsabilité Illimitée.

·         Le népotisme commence à faire des ravages au CNRS.

·         Untel s'est débrouillé pour faire recruter son fils.

·         Untel Autre s'est débrouillé pour faire recruter sa fille.

·         Untel Autre Bis s'est débrouillé pour faire promouvoir sa maîtresse. (Stop ! ici je censure).

·         Au CNRS, les concours ne sont pas vraiment des concours.

·         Aux concours du CNRS les dés sont pipés.

·         Le CNRS a une politique.

·         La politique du CNRS est nationale.

·         Si l'on voulait démolir le CNRS, on ne s'y prendrait pas mieux.

·         Il existe une volonté délibérée de démolir le CNRS.

·         Il faut démanteler le CNRS.

Je remercie les lecteurs qui ont attiré mon attention sur quelques-unes de ces perles et les encourage à continuer à m'alimenter avec leurs trouvailles. Les connaisseurs noteront que certaines de ces phrases ont des vies passionnantes : certaines s’éclipsent vite, d’autres durent plus longtemps, d’autres encore semblent redevenir d’actualité de manière périodique ou même quasi cyclique.

Responsabiliser les directeurs d'unités :

Cette proposition n'a rien d'original. J'ai entendu de nombreux directeurs de laboratoires réclamer davantage de pouvoir de décision. Une grande majorité de chercheurs le souhaite également à condition que cela soit fait dans un maximum de transparence et que les règles du jeu soient bien expliquées à tout le monde. Est-il utile de préciser : toutes les règles ! Il doit être possible aussi de faire des règles (au moins certaines d'entre elles) à la carte, afin de prendre en compte certains particularismes liés au domaine scientifique, à la nature du laboratoire, à la personnalité de ses leaders et de ses personnels. Ceci n'a rien de révolutionnaire puisque, de fait, c'est ainsi que les choses se passent dans la réalité. Dans certains laboratoires, les gens arrivent à l'heure comme des métronomes, alors que dans d'autres, ceux qui arrivent en retard croisent ceux qui partent en avance. Dans certains, le directeur est un dictateur (espèce, paraît-il, en voie d'extinction), dans d'autres, une personne de consensus. Dans certains, c'est l'autonomie la plus débridée dans le choix des thèmes de recherche ou des outils de valorisation, dans d'autres, tout est discuté. Ce qui n'empêche qu'il y ait d'excellents laboratoires dans chaque catégorie, et de moins bons dans chaque catégorie aussi.

Néanmoins, cette proposition peut sembler être une gageure dans un pays comme le nôtre qui est profondément aristocratique. Entendez par là qu'à l'instar de ce qui se passait sous l'Ancien Régime (celui d'avant 1789), le pays est divisé en deux parties : les aristocrates et le peuple ; ou encore les chefs et les autres. Ce qui peut se décliner de multiples manières : les nantis et les miséreux ; les actifs et les chômeurs ; les polytechniciens et ceux qui ne le sont pas ; Paris et la province... Ne cherchant pas la polémique, je m'arrêterai là. Sous des dehors d'idéal démocratique (que j'ai la faiblesse de croire sincère) le Français est bien souvent très régalien, et à la poursuite des privilèges pour lui-même et pour ses proches (un sondage, en 1990 me semble-t-il, fut particulièrement instructif : nos concitoyens reprochent aux fonctionnaires leur – proverbiale – faible ardeur au travail mais souhaitent pour leurs propres enfants une belle carrière dans la fonction publique !). Les privilégiés étant en général ceux qui disposent du pouvoir, le Français a une relation freudienne avec ce dernier. Si le citoyen apparaît frondeur, c'est qu'il est au fond légitimiste et donc incapable de gérer cette profonde contradiction, conséquence probable de plusieurs siècles de centralisation. Le Français, donc, aime et déteste simultanément l'autorité et la hiérarchie. Le chercheur ne fait pas exception à la règle. Et pourtant, une structure doit être nécessairement hiérarchique. A ce stade, le lecteur pourra s'offrir une pause en méditant sur les vertus comparées des différentes structures d'organigrammes à travers le monde*.

* Page loufoque tirée d'une revue par ailleurs très sérieuse : Le Progrès Technique, n° 22, p. 36 (1981), annexe 13.

Si j'ai osé élever le discours à une hauteur sociologique c'est pour en arriver à ceci : dans le vent historique de la décentralisation et du transfert d'une partie des pouvoirs de l'Etat à certaines collectivités territoriales plus proches du citoyen, ne pourrait-on pas aller jusqu'à reconnaître que le chercheur – sinon tous, du moins au niveau responsable d'équipe ou directeur de laboratoire – est suffisamment grand pour pouvoir assumer un certain nombre de décisions lui-même. Je veux parler ici notamment de décisions en matière de valorisation mais avec un peu d'imagination, on devrait certainement pouvoir étendre la discussion à d'autres domaines.

Ceci n'a d'ailleurs rien de révolutionnaire, puisque quotidiennement il lui arrive déjà d'accepter un contrat avec une entreprise (quitte à le faire gérer par l'ADER du coin !), de donner son feu vert pour que l'un de ses chercheurs soit consultant à l'extérieur, de se préoccuper pour faire protéger (ou pas) une découverte réalisée dans son équipe, de participer à la création d'une entreprise, etc... etc... Qui, mieux que lui, peut savoir si telle affaire est justiciable d'un contrat de collaboration, du dépôt d'un brevet, ou d'une opération de consultance. Bien sûr, s'il est prudent et sage, il ne décidera pas tout seul mais saura s'entourer d'avis et de conseils. Il sait notamment que le CMI peut lui être d'une certaine utilité à cet égard.

Rendre officiellement au chercheur la maîtrise d'un certain nombre de décisions qui lui appartiennent d'ailleurs déjà de fait me semble aller dans le sens de l'histoire. De plus, on allégera ainsi des rouages administratifs particulièrement sollicités.

Éviter le syndrome du Concorde :

La France a su réussir quelques grandes aventures scientifiques et industrielles : le programme électronucléaire, le Concorde, le TGV, le respect des horaires par la SNCF, le Minitel, etc... En revanche, nous semblons avoir un problème à concrétiser sur de petites opérations qui demanderaient plutôt à être conduites comme un commando. Est-ce la faute à Descartes ? Est-ce la faute à Diderot ? On trouvera, et l'on aurait tort de ne pas s'en réjouir, des contre-exemples savoureux tels que, par exemple, la carte à puce, mais globalement le constat est malheureusement assez tragique.

Notre culture humaniste nous pousse à nous intéresser aux grands problèmes : la Liberté, Dieu, le Transfert de Technologie (prière de remarquer le crescendo), que nous sommes capables de disséquer dans tous les sens grâce à notre intelligence analytique. Nous sommes capables de concevoir, de nous organiser pour, et de mener à bien des projets structurés qui peuvent être titanesques. C'est l'optique des grands programmes ; c'est aussi ce que l'on pourrait appeler le syndrome du Concorde. En revanche, nous sommes moins bons lorsqu'il s'agit de saisir une opportunité qui passe, sauf peut-être à titre tout à fait personnel ! Les étrangers reconnaissent que nous sommes inventifs mais que nous avons des difficultés pour concrétiser. Notre système éducatif a-t-il trop tendance à mettre l'accent sur l'abstraction ? Des amis Italiens me disaient que nos théoriciens du design sont parmi les meilleurs au monde, mais ce sont les leurs qui font vendre !

En fait, je pense que nous avons une très mauvaise culture technique, ce qui se conçoit aisément puisque la technique, c'est sale et il y a de la graisse partout. Attitude éminemment aristocratique. Notre goût prononcé pour le bricolage ne saurait être brandi comme contre-argument ; en effet, Louis XVI était bien serrurier. Notre piètre culture technique pourrait bien être l'un des fruits – amer – d'un système éducatif élitiste jusqu'à l'excès. Dans ce système, l'hégémonie des mathématiques est suffisamment connue pour que je n'aie pas à m'y attarder. On peut regretter aussi une approche des problèmes trop conceptuelle et déductive, menée au détriment de la démarche expérimentale, par nature plus inductive. On y ajoutera un environnement légal et culturel qui ne favorise pas la prise de risque et qui punit durement l’échec. Un des autres fruits – tout aussi amer que le premier – est constitué par l’ignorance crasse de nos concitoyens en matière d’entreprise : pour la grande majorité du peuple, les entreprises c’est les patrons ; et les patrons sont les exploiteurs du peuple... Mais ceci serait une autre histoire... Quoique...

Le cloisonnement traditionnel de la société française fait le reste. Il faut avouer que la situation est heureusement en train d'évoluer dans le bon sens, et il n'est plus rare pour un chercheur, au cours d'un dîner en ville, de se retrouver assis entre un banquier et un entrepreneur. C'est ce brassage social accéléré qui devrait donner aux opportunités une plus grande chance d'apparaître et prendre corps. Or, très souvent, ces opportunités sont difficilement prévisibles a priori, d'autant que la composante humaine y joue un rôle déterminant. Il convient de multiplier les occasions de rencontres et d'échanges entre des gens possédant des profils extrêmement divers.

Que de réussites sont le fruit du hasard. Hasard heureux, sans doute, certainement suivi de beaucoup de travail et d'efforts, mais hasard sans lequel les choses n'auraient pas été. Vouloir remplacer à tout prix, et partout, ce hasard par une organisation rationnelle et cartésienne me semble illusoire, très coûteux et sans garantie. Laisser jouer le hasard est également sans garantie mais tellement moins cher. Imaginer qu'une armée d'experts, aussi qualifiés soient-ils, puissent, dans le calme studieux de leurs bureaux décréter que telle technologie n'a aucun avenir ou aucun marché me semble aussi dangereux que d'interdire la construction des trains parce que l'organisme humain ne pourra jamais supporter des vitesses supérieures à 60 Km/heure (c'est ce que des scientifiques influents – dont le grand Arago lui-même – pensaient au début du XIXe siècle). Dans le même ordre d'idées, on peut également remercier les quelques fous furieux qui se sont obstinés à essayer de faire voler des objets plus lourds que l'air.

L'anecdote suivante me paraît tout à fait illustrative. Dans l'un de mes anciens laboratoires, quelques chercheurs (des marginaux, sans doute un brin écologistes), spécialistes de mécanique des fluides, entraînés par des complices, conçurent un jour l'idée de créer une entreprise (ce qui était illégal, comme nous l'avons vu plus haut) pour fabriquer des éoliennes. Cherchant tout naturellement des bailleurs de fonds, ils se tournèrent vers l'Etat (nous sommes en France). Ils reçurent donc la visite d'un technocrate (les qualités personnelles de l'intéressé ne sont bien sûr pas en cause), spécialiste du domaine, qui leur démontra que le marché étant très faible (le mot marginal a certainement dû être utilisé), que la France possédant déjà un constructeur d'éoliennes, la société Aérowatt, il ne pouvait y avoir la place pour un second fabricant (une concurrence franco-française serait une bêtise). En foi de quoi, il leur déconseilla fermement de créer leur entreprise, et leur dit que de toutes façons ils n'obtiendraient de lui aucune aide financière. Nos héros, convaincus de la validité de leur approche, révisèrent leur copie, et réalisèrent qu'il n'y avait aucun intérêt à fabriquer des générateurs de courant puisqu'on pouvait en trouver de convenables sur le marché. En revanche, leurs idées concernant les pales d'éoliennes semblant bonnes, il y avait un marché à prendre et ils se jetèrent à l'eau. A l'air plutôt : Atout Vent S.A. était née. L'entreprise commença à produire et à vendre, surtout à l'étranger (première surprise). Un beau jour, un certain Monsieur Vergnet les appela. Il avait racheté la société Aérowatt après que cette dernière eut déposé son bilan (deuxième surprise). Il leur tint à peu près le langage suivant : " Je vendais jusqu'à présent beaucoup de mes éoliennes au Service des Phares et Balises. Or, depuis peu, ce client souhaite continuer à acheter chez moi la partie générateur, sur laquelle il monte des pales qu'il se procure chez vous, car les vôtres ne cassent pas dans la tempête. J'aimerais vous rencontrer. " La suite de l'entretien est privée et ne présente pour nous aucun intérêt. Fin 1996, la société Atout Vent faisait vivre quinze personnes et réalisait 97 % de son chiffre d'affaires à l'export*.

* Dans la version 4.3 (janvier 1991), Atout Vent avait quatre salariés et exportait 75 % de sa production. Après une croissance très – trop ? – forte et mal maîtrisée, marquée notamment par l’entrée dans son capital d’un groupe industriel important, fabricant de fibres pour composites, la société a déposé son bilan fin 1996 dans des conditions qui ont fait l’objet de critiques. Une nouvelle société a démarré peu après, ATV Entreprise, avec essentiellement les mêmes acteurs, et la technologie initiale continue son bonhomme de chemin. Fin 2001, ATV compte une trentaine de salariés.

Ce succès – mineur, et j'en conviens, face au PIB français – montre tout simplement que même un expert peut se tromper et que les spécialistes de futurologie ont raison : "s'il y a une chose qui soit impossible à prévoir, c'est bien l'avenir."

Alors, de grâce, cessons de censurer a priori trop de projets de valorisation au prétexte qu'ils ne déboucheront pas sur l'innovation du siècle. Ne traitons pas par-dessous la jambe les "petites" opérations de valorisation. Il suffit parfois de très peu de chose pour aider une PME à améliorer un produit ou à en imaginer un autre. Et quand bien même la petite opération de valorisation se solderait par un simple accroissement de la culture technique (je n'ose pas dire scientifique) de ladite PME, j'affirme que ce serait positif. De plus, il est illusoire de penser que chaque opération puisse être une réussite. Donc, plutôt que de viser, comme objectif, un taux de déchets égal à zéro, il semble plus raisonnable de créer les conditions permettant au plus grand nombre possible d'initiatives de voir le jour et laisser jouer ensuite la sélection naturelle avec ses propres règles. Ce qui ne signifie pas ne pas donner, par-ci par-là, un coup de pouce à la nature. Comme en zootechnie, la performance est à ce prix.

Pour y parvenir, et afin que les investissements passés ne soient pas jetés aux orties, je suggère simplement de rendre aux CMI leur caractère opérationnel d'agents de terrain en les débarrassant d'une bonne quantité de tâches de gestion et d'intendance. Alors, ils pourront recommencer à oeuvrer de façon effective avec les autres intervenants spécialisés qui existent en nombre suffisant (pléthorique ?) dans les multiples réseaux locaux, nationaux et même internationaux. Ce travail s'apparente à de la véritable veille technologique appliquée. Il permettra d'aller au-delà du simple discours – aussi passionnant soit-il – sur le transfert de technologie et de réaliser des transferts de technologies réels. Les exemples de réussite sont déjà très nombreux. Il suffit de mettre encore plus d'idées en pratique pour faire encore mieux. Afin que "Le discours de la méthode", qui fut écrit en français, n'ait pas été écrit en vain.

Ne pas oublier que l'avenir technologique est imprévisible :

L'histoire des sciences et des techniques est remplie de technologies qui, comme l'anecdote contée ci-dessus voulait l'illustrer, ne pouvaient pas marcher, de technologies auxquelles on ne croyait pas ou, de façon symétrique d'ailleurs, de technologies auxquelles on croyait trop. On ne compte plus les erreurs d'appréciation ou d'évaluation. Souvenons nous : à la fin du XIXe siècle, la physique était terminée ; on avait tout découvert. Tout ce que l'on pouvait espérer c'était affiner par ci, peaufiner par là mais c'en était bien fini des grandes découvertes. Tout ce qui fait le monde moderne, la radio, la télévision, la radioactivité, le nucléaire, l'avion, etc. etc. étaient simplement impensables (au sens étymologique : on ne pouvait pas les penser, les imaginer). De même que nous ne pouvons pas imaginer ce qui va être technologiquement possible demain et qui sera la base du développement du prochain cycle de Kondratiev* et de ceux qui viendront après.

* Certains pensent que les technologies de l'information pourraient jouer ce rôle d'entraînement. J'en serais surpris car on n'a jamais vu personne se soigner, se nourrir, se vêtir ou faire fonctionner des machines grâce à de l'information. Aussi, au risque de m'égarer (l'avenir est imprévisible !), je parie que les révolutions à venir se cachent dans les secteurs "basiques" suivants : agro-alimentaire et médicament, énergie et matériaux. Mais dans lequel se produira le premier déclic ? Mystère. Quant à l'information, elle ne fera - au mieux - qu'accompagner le reste... ce qui ne serait déjà pas si mal que ça.

Note de novembre 2001 : Les lignes précédentes avaient été écrites au milieu des années 90 c'est-à-dire bien avant "l'explosion de la bulle" de la "nouvelle économie" (celle autour de l'Internet) à partir d'avril 2000, au moment où les "experts" prévoyaient une croissance annuelle de 25 % des profits de ce secteur pour les 5 prochaines années !

L'une des barrières qui s'opposent le plus sûrement à l'acquisition d'une position d'ouverture au champ infini des possibles est le conformisme. Or, nous vivons avec l'idée que les chercheurs sont quasiment tous des anticonformistes. Que nenni* !

* Le lecteur qui aurait des doutes est vivement encouragé à se plonger dans la lecture et la méditation d'un livre qui me paraît incontournable à cet égard : "Organisation de la recherche et conformisme scientifique", ouvrage collectif dirigé par A. Esterle et L. Schaffar, PUF Nouvelle Encyclopédie Diderot, Paris, 1994.

Mais ceci n'étant qu'un pamphlet, je ne me lancerai pas ici dans une analyse sérieuse (pour une analyse sérieuse, cliquer ici) et me contenterai de rappeler quelques faits puisés dans une littérature surabondante et dans laquelle on n’a vraiment que l'embarras du choix :

·         Ernst Mach (celui du nombre de Mach) considérait qu'il n'était pas scientifique de s'intéresser à des choses hypothétiques comme des atomes qui sont des objets que l'on n'observe pas directement. A noter que l'opinion des anti-atomistes n'a pas été pour rien dans le suicide de Boltzmann en 1906. Aux petites causes, parfois de grands effets.

·         Lord Kelvin, qui a laissé son nom attaché à l'échelle absolue de température, était président de la Royal Society lorsqu'il a dit en 1903 : "Les rayons X sont une mystification". Ceci, huit ans après leur découverte par Röntgen. Les grands hommes font de grandes erreurs.

·         Thomas Watson, président d'IBM et fils du fondateur de la société, a dit en 1958 : "Je pense que le marché mondial des ordinateurs est d'environ cinq machines". Il est vrai qu'à l'époque, une machine avait la taille d'une maison.

·         Thomas Edison, que je ne présenterai pas, a dit en 1915 : "On ne volera jamais le phonographe, il n'a aucune valeur commerciale". Ah ! la vigueur des arguments "commerciaux".

·         Quant aux experts de la SNCF, ils pensaient en 1964 à propos de la ligne Paris-Lyon qu'il n'y avait pas un trafic prévisible susceptible de justifier la réalisation d'une nouvelle liaison qui aurait mis les deux villes à une heure un quart l'une de l'autre, même avec un ou deux arrêts intermédiaires*. Or, le TGV effectue aujourd'hui ce parcours en deux heures... et, bien souvent, sans arrêt intermédiaire.

* Cette "bonne raison" a été utilisée par la SNCF dans son argumentaire pour empêcher la construction de l'Aérotrain de Jean Bertin (le fondateur de la célèbre société de recherche sous contrats Bertin & Cie).

On peut toujours feindre de croire que dans toute société humaine les positions les plus extrêmes vont se compenser en partie et laisser l'establishment adopter en quelque sorte une valeur moyenne qui serait sinon marquée au sceau du bon sens, du moins dirigée dans le sens de l'histoire. Hélas ! pas du tout, ou trop rarement. Et c'est ainsi que, à la suite de l'invention de l'imprimerie qui était en train de provoquer une agitation culturelle et sociale dangereuse grâce à la facilité de diffusion qu'elle offrait pour les idées subversives, la Sorbonne a fait signer à François Ier, roi de France, l'incroyable ordonnance du 13 janvier 1535 qui supprimait l'imprimerie.

Ou encore, le comité d'attribution du prix Nobel qui voulait récompenser Einstein n'a pas osé le faire pour la théorie de la relativité – elle était trop récente, peu de gens étaient encore en mesure de la comprendre, et puis, si elle avait été fausse ! Einstein a donc été récompensé en 1921 pour avoir trouvé l'explication de l'effet photoélectrique. Il faut dire que le comité du Nobel s'était passablement fourvoyé en décernant en 1917 un prix à Barkla, le découvreur des rayons J, rayons qui, comme chacun le sait depuis, n'existent pas. Rebelote en 1927 lorsque Filiger obtint un prix Nobel pour ses travaux sur un cancer expérimental qui n'a, lui non plus, jamais existé. Errare humanum est. Alors : prudence !

Les lecteurs qui ont le goût du risque et/ou ceux qui s'intéressent aux choses futiles* sont priés de surveiller le dossier "fusion froide"** et celui de la "mémoire de l'eau"***. Ces dossiers pourraient dans un avenir pas trop lointain nous apporter une belle moisson de faits scientifiques et technologiques nouveaux et quelques observations sociologiques passionnantes. Il est possible – mais qui peut prétendre en être certain ? – que nous puissions assister là en direct à un énième remake de "la fin de la physique".

* Espérons qu'il en reste encore quelques-uns dans le monde de la recherche.

** Je veux parler d'un phénomène très controversé : la fusion nucléaire à des températures proches de l'ambiante dans la lignée des "résultats" (je mets des guillemets car il faut toujours être circonspect) publiés par Pons et Fleischmann à l'université d'Utah en 1989.

** Je veux parler des travaux très controversés de Jacques Benveniste de l'INSERM visant à montrer que l'homéopathie fonctionne réellement. Malheureusement, la forte médiatisation de l'appellation "mémoire de l'eau" ne rend pas suffisamment justice à ces travaux. Cf. l'article de Madeleine Ennis, une biologiste de la Queen's University de Belfast (Irlande), dans "Inflammation Research" (2001, Apr. 50 Suppl 2:S47-8) et qui semble apporter de l'eau J au moulin de J. Benveniste. Jacques Benveniste est mort le 02/10/2004. Adieu Jacques ! Je t’ai connu trop peu et trop tard...

 

 

ANALYSE D'UN CAS : UNE AFFAIRE QUI FAIT DU BRUIT

Que le lecteur m'accorde son indulgence – et je l'espère sincèrement – mais je suis ainsi fait qu'il m'apparaît d'un intérêt mineur de gloser sur des opérations à succès. D'autres savent y exceller beaucoup mieux que moi. Je trouve, pour ma part, plus instructif d'essayer de démonter les rouages d'opérations qui ont échoué ou qui ont posé problème.

L'histoire suivante s'est réellement déroulée ainsi que je vais le conter, et j'en ai été le témoin, pour ne pas dire l'un des acteurs. Tous ses protagonistes sont encore de ce monde. Or, je suis d'un naturel très doux, et comme je ne désire fâcher personne, j'ai volontairement modifié certaines données telles que l'objet de l'invention, les noms des personnes, du laboratoire et des entreprises qui y ont été ou y sont impliqués. En revanche, les dates sont scrupuleusement exactes car l'écoulement du temps est un paramètre qu'il importe de bien ressentir. De même pour la nationalité des participants, car cet élément est loin d'être neutre. Les lecteurs initiés reconnaîtront facilement l'affaire dont il est question. Pour les autres qui la découvrent, les détails que j'ai occultés seraient d'une importance tout à fait insignifiante ; il est à mon sens plus important que le lecteur s'attache aux mécanismes qu'une telle histoire met en évidence afin de comprendre comment nous avons pu en arriver là.

Tout a démarré le jour où le Laboratoire de Météorologie Analytique (LMA), Unité Propre de Recherche du CNRS, après de longues et difficiles recherches théoriques, trouva le moyen d'agir sur la coloration du ciel. L'homme devenait capable de modifier l'un des paramètres les plus importants de son environnement. La technique dite CCC (appellation médiatique signifiant : Contrôle de la Coloration du Ciel) venait d'être rendue possible grâce à l'arrivée sur le marché de nouveaux composants électroniques rapides pouvant, à l'aide des méthodes de calcul et des algorithmes mis au point au LMA, agir en temps réel sur toute modification de l'un des nombreux paramètres responsables de la couleur du ciel en un lieu donné. La véritable cheville ouvrière de cette innovation était un jeune étudiant en thèse, Christian Emrac, dont l'opiniâtreté permit de faire fonctionner au LMA le premier montage expérimental. C'était vers la fin de l'année 1985 et j'étais à l'époque CMI. Je fus donc naturellement saisi de cette affaire par les chercheurs qui y étaient impliqués. L'invention semblant prometteuse – on peut imaginer facilement de nombreux champs d'application possibles, à commencer par certains usages militaires (que les pacifistes me pardonnent) – le dossier fut, selon les pratiques en vigueur à l'époque, confié à la Direction de la Technologie de l'ANVAR, et la décision fut prise de déposer une demande de brevet. Le CNRS devint ainsi titulaire du brevet français numéro 86.03394 qui fut ensuite largement étendu dans les principaux pays industriels. Jusque là, tout s'était merveilleusement passé, et dans un temps record.

Simultanément, les contacts de l'équipe du LMA avec le monde industriel et militaire allaient bon train et laissaient présager pour cette technologie un avenir radieux. Il ne restait plus qu'à trouver les financements permettant de réaliser des maquettes d'application et des prototypes correspondant aux principales applications envisagées.

C'est alors que la mécanique commença à s'enrayer. Le Service d'Etudes pour la Formation des Tempêtes (SEFT) de l'armée, pourtant très intéressé, ne réussit pas à bousculer son planning déjà surchargé afin d'y inclure notre projet. Pour schématiser, c'est en effet au cours de l'année N-2 qu'il convient de prévoir de proposer à la Commission de Sélection d'étudier le projet durant l'année N-1. En cas d'acceptation, le projet montera, aussitôt ou au pis l'année suivante N, en Commission de Décision qui le mettra à l'ordre du jour de la prochaine réunion, qui a lieu, si tout se passe bien, au cours de cette même année N. En cas de feu vert, l'Etat-Major tranchera et le financement du projet sera inscrit au prochain budget (année N+1), ce qui permettra aux laboratoires de développement de l'armée de disposer de leurs crédits au cours de l'année N+2. Ceci les mettra alors immédiatement en mesure (hors délais de visa et de signature des contrats) de financer les travaux de développement confiés au LMA.

Devant ces difficultés avec les militaires, et conscients que le temps travaillait pour des technologies concurrentes – nous obtenions régulièrement des informations préoccupantes provenant de diverses équipes concurrentes situées à l'étranger – le LMA eut le bon réflexe de se tourner vers des entreprises industrielles françaises. Deux furent retenues principalement. La première, la société CELIS, de plus de 2000 personnes et filiale d'un grand groupe, et la deuxième, la société NOLE, véritable PMI d'environ 170 personnes, et connaissant très bien les marchés militaires. Toutes deux étaient, à les croire, ex-trê-me-ment intéressées. Il fut hélas impossible d'arracher une décision ferme de leur part : CELIS avait des temps de réaction dignes d'un dinosaure, et NOLE n'avait pas d'argent (PMI oblige). Pendant ce temps, la concurrence continuait à avancer. Nous étions fin 1987.

Je me dois ici, de faire un petit retour en arrière. La technologie CCC dont il est question, fait appel, comme souvent toute technologie avancée, à des savoir-faire extrêmement pointus et divers : électronique rapide, algorithmique, informatique, etc... Son transfert vers des entreprises n'est pas chose facile et pose un grand nombre de problèmes que les spécialistes en innovation connaissent bien (ce qui ne veut pas dire qu'ils les maîtrisent toujours parfaitement). Ce type de technologie peut être, au contraire, très bien adapté pour la création d'une entreprise.

Au début 1986, le CNRS avait encore dans sa politique la volonté affichée de créer des filiales et le LMA s'attela à un tel projet mais celui-ci ne put jamais être mené à terme car entre temps, nous avions changé de politique. L'équipe de chercheurs se dit alors avec philosophie : " Le développement de notre technologie ne peut être tributaire de telles vicissitudes administratives. Devant les difficultés conjoncturelles que nous avons avec les militaires et les industriels, difficultés essentiellement dictées par le fait que la technologie CCC est insuffisamment mature et crédible ; devant le fait que les travaux de développement encore nécessaires ne peuvent être assurés par le LMA dont ce n'est pas la vocation, et cela risquerait de nous être reproché ; la seule solution possible est la création d'une entreprise. De plus, si le CNRS était amené à l'avenir à changer à nouveau sa politique de filiales et que celles-ci redeviennent d'actualité, l'entreprise que nous aurons créée sera prête pour être filialisée. Enfin, nous avons avec nous un jeune thésard en la personne de Ch. Emrac, qui n'a pu être recruté par le CNRS à cause du manque de postes. Il n'est pas fonctionnaire. Il pourra donc assurer la direction de cette société. Le salaire qu'il percevra lui permettra de vivre décemment, et nous aurons fait d'une pierre trois coups. "

Ainsi naquit TEXXOVAL, SARL au capital de 50 400 Francs, avec 14 associés fondateurs dont 11 agents CNRS du LMA. Le lecteur perspicace s'apercevra que 50 400 est divisible par 14, ce qui n'est absolument pas neutre. J'aide le lecteur un peu trop versé dans l'arithmomancie en lui précisant que la signification cachée n'est pas de nature magique. Le gérant de la société était Ch. Emrac. Une telle entreprise, très sous-capitalisée, ne pouvant fonctionner qu'en osmose avec le laboratoire d'origine, il fut décidé, afin de clarifier et rendre transparentes les relations TEXXOVAL-LMA, de passer une convention entre le CNRS et TEXXOVAL. Le CMI et les responsables du LMA se mirent à la tâche et entreprirent la rédaction du document contractuel. Celui-ci prévoyait les conditions dans lesquelles une partie au moins des activités de TEXXOVAL pourraient être effectuées dans les locaux du LMA. Dans ce cas, et afin que l'opération ne coûte rien au laboratoire, la convention prévoyait le versement au CNRS de rétributions correspondant à un "loyer" ainsi qu'au remboursement des frais d'infrastructure (utilisation d'électricité, fluides, téléphone, etc...). De plus, dans l'éventualité où TEXXOVAL aurait eu besoin de faire appel aux compétences du personnel du LMA, la société s'engageait à rembourser au CNRS les salaires des agents sur la base des "tarifs" administratifs en vigueur, les agents en question devant effectuer auprès de l'administration toutes les démarches nécessaires afin d'être dûment autorisés à se livrer à de telles activités. Il convient de remarquer qu'un tel montage n'est pas exceptionnel lorsque une entreprise créée par des chercheurs est hébergée au sein d'une université.

C'est alors que se produisit un nouveau dérapage. Le LMA est une unité propre du CNRS et notre administration, en vertu de la bonne vieille politique du parapluie, jugeant que le montage proposé était illégal, brandit les fameux textes de lois dont nous avons parlé dans un chapitre antérieur. Les agents du LMA furent fermement priés de rentrer dans le rang. On peut imaginer l'effet hautement perturbateur d'une telle décision sur des gens qui, en leur âme et conscience, n'avaient rien à se reprocher. Les plus fragiles et angoissés faillirent craquer. Quant aux plus solides, la décence et la discrétion m'interdisent de rapporter quels furent leurs propos ou leurs comportements. Le désenchantement, pour ne pas dire la démotivation, qui s'en suivit me permettent d'affirmer que nous avons fait un beau gâchis. Certains sont à jamais perdus pour la valorisation et le transfert de technologie, et éviteront désormais cette activité comme la peste. C'était le mois de mars 1988. L'"affaire" TEXXOVAL était terminée, du moins officiellement.

Entre-temps, en fait depuis que l'"affaire" avait éclaté durant l'automne 1987, le LMA se démotivait chaque jour davantage pour le transfert de la technologie CCC. Décidé à s'en débarrasser au plus vite, et comme aucune entreprise française ne se pressait au portillon, le laboratoire fut ravi de voir se présenter un beau jour des industriels italiens qui se dirent intéressés. C'étaient des gens avec qui j'étais en contact et dont je n'avais aucune raison de me méfier. Ils nous firent plutôt bonne impression. Nous avions en fait, affaire à un véritable réseau de plusieurs PME/PMI travaillant en synergie grâce notamment à de multiples participations croisées. Il serait intéressant d'en dire davantage car le niveau de performance d'une telle organisation est indéniable, mais il s'agit d'une autre histoire. Les Italiens décidèrent de créer dans leur pays une structure nouvelle – la société RIGOL née en janvier 1988 – destinée à développer la technologie CCC et dont la présidence (honorifique) fut confiée à Ch. Emrac. Ce dernier, n'étant plus gérant de TEXXOVAL, devait, en outre, percevoir une rétribution destinée à le mettre à l'abri du besoin. Le temps pressait ; il fallait faire vite. La négociation, par l'ANVAR et le CMI, de la licence, non exclusive, du brevet CNRS à RIGOL eut lieu le 17 février 1988 et les conditions entérinées au cours d'une réunion mixte CNRS-ANVAR (dite Groupe de Valorisation) du 23 février. RIGOL n'avait pas attendu la négociation proprement dite pour se lancer, en Europe, dans une vaste campagne de marketing qui lui confirma l'intérêt de la technologie CCC. Ces démarchages, associés à la publicité effectuée par le CMI et le LMA, amenèrent un véritable raz-de-marée de demandes d'entreprises qui affluèrent d'un peu partout à travers le monde. J'eus même le privilège de recevoir un jour, en provenance de son bureau de Londres, l'honorable Monsieur Iheu, responsable pour l'Europe d'un grand groupe nippon. La société américaine HEVVY se mit également sur les rangs.

Tous ces événements provoquèrent un sursaut des entreprises françaises qui, entendant le chant du coq, et afin de parer à toute éventualité, nous rappelèrent qu'elles devaient être prioritaires. Elles jugèrent cependant qu'il était trop tôt pour une licence et se contentèrent de demander une option. Il fut ainsi décidé le 21 décembre 1987 d'accorder à la société NOLE une option sur licence. La même décision en faveur de CELIS fut prise le 9 mars 1988, ce qui confirme au passage qu'une grande entreprise réagit plus lentement qu'une PME. Quant aux Américains, leur absence d'états d'âme permit à la société HEVVY de nous arracher, le 12 avril 1988, la décision de lui confier une licence au moins pour l'Amérique du Nord. Les choses semblaient, somme toute, assez bien rattrapées.

Mais le lecteur attentif se souviendra que le printemps 1988, fut particulièrement riche en péripéties diverses. La France vécut un changement de gouvernement. Le CNRS vit un changement de directeur général. La DVAR changea son responsable du service brevets et licences. Beaucoup de choses furent perturbées, d'autres furent modifiées, on remit même en cause toutes les décisions antérieures concernant la valorisation de la technologie CCC. Il fallut attendre le 7 juin 1988 pour que soit reconfirmé le principe des licences à RIGOL et à HEVVY.

Ces lenteurs déstabilisèrent durablement RIGOL, qui ne voyant pas arriver son contrat de licence dans des délais raisonnables, et concluant que le CNRS avait changé d'avis, fit évoluer ses activités vers d'autres créneaux technologiques. Elle engloutit ainsi bien plus que son capital et ne s'en remettra jamais, comme nous le verrons plus loin. La rémunération promise à Ch. Emrac se réduisit à une misère. Entre-temps, notre héros, dont le plus grand rêve était d'être recruté par le CNRS sur un poste de chercheur, vit ses espoirs déçus par deux fois : la première en décembre 1987 (cette année-là le concours eut lieu fort tardivement !), la seconde en juin 1988. Les raisons de ce double échec sont certainement très complexes, mais le fait que Ch. Emrac ait découvert quelque chose, puisqu'il fut le premier à faire fonctionner la technologie CCC, a dû jouer un rôle (un chercheur est fait pour chercher et non pour trouver !). Comme il n'était pas issu d'une famille fortunée, ses finances et son moral furent vite au plus bas. Le CMI et la DVAR se mirent en quatre pour lui faire obtenir un poste d'ingénieur de valorisation mais il commit une erreur grave en déclinant cette proposition. L'état de son système nerveux explique probablement ce mauvais choix. Ne pouvant continuer à vivre longtemps ainsi d'amour et d'eau fraîche, notre héros chercha du travail. La chance lui sourit à travers la société SICOFANT qui lui proposa un salaire très confortable, se déclara non intéressée par la technologie CCC, et lui promit les coudées franches pour lui permettre d'en effectuer le transfert vers les sociétés RIGOL et HEVVY comme il en avait pris l'engagement envers le CNRS. Le CMI, fin diplomate, organisa même une réunion entre RIGOL et SICOFANT dans les locaux de cette dernière société. On ne pouvait rêver mieux. Notre héros accepta et fut embauché le 22 août 1988. Aussitôt fait, SICOFANT prit conscience que la CCC pouvait présenter pour elle un certain intérêt, et commença de grandes manoeuvres en vue de récupérer la technologie. Utilisant d'abord la psychologie, puis la carotte, et enfin le bâton, le patron de SICOFANT – homme habile s'il en est – ne parvint pas à ses fins, malgré des actions au plus haut niveau. Le CNRS sut s'en tenir aux engagements pris et ne céda pas aux pressions. Notre pauvre Ch. Emrac fit à nouveau les frais de l'opération : il fut licencié le 21 février 1989. L'"affaire" SICOFANT avait fait de nouveaux dégâts. Le destin s'acharnait contre nous.

Pendant ce temps, la licence accordée à RIGOL ayant été signée le 26 janvier 1989 (le lecteur a bien lu), les Italiens, exsangues, essayèrent de vendre la peau de l'ours mais oublièrent que la bête était encore en vie. Il s'en suivit des conflits internes en cascade dont les péripéties rempliraient plusieurs volumes et durèrent plus d'un an. Cette période agitée fut émaillée de nombreuses rencontres bi ou multipartites entre les nombreux protagonistes, avec entrées en scène de nouveaux acteurs, rebondissements et sorties de scène. L'embrouillamini prit un tour de plus en plus conflictuel. Cette période fut pour moi très féconde car mes connaissances en psychologie et mes compétences en psychiatrie s'en trouvèrent considérablement enrichies. Je ne puis faire une comparaison – simplificatrice – qu'avec "l'huître et les plaideurs" ou "l'Iliade". Zeus, courroucé, semblait avoir décidé que la technologie CCC ne verrait jamais le jour.

Entre-temps, la technologie CCC continuait à faire parler d'elle à travers le monde et à progresser. Ch. Emrac, par son travail obstiné, conservait une certaine avance sur la concurrence. La société NOLE décida enfin de lever l'option qu'elle détenait. Il fut aussitôt décidé (le 13 mars 1990) de lui accorder une licence ferme. RIGOL, n'ayant pas réussi à passer à l'industrialisation dans les délais impartis, le CNRS décida, le 29 mai 1990, de résilier la licence qu'il lui avait accordée. Le lecteur sera sans doute surpris d'apprendre qu'à la date à laquelle j'ai écrit les présentes lignes (6 janvier 1991), la résiliation n'est toujours pas effective. Que le lecteur n'aille pas imaginer le pire et n'y voie aucun machiavélisme : la lettre de résiliation qui était prête à partir le 10 octobre 1990 a été malencontreusement détruite. Elle fut refaite et put enfin partir mais retourna fin novembre à son expéditeur (l'ANVAR) avec la mention (traduite de l'italien) "ne réside pas à l'adresse indiquée". Le malheureux Ch. Emrac, devenu chômeur dans l'intervalle, excédé par les hésitations de tous ses partenaires industriels (qui lui retournaient d'ailleurs le compliment), décida alors de créer sa propre entreprise. Le CNRS lui ayant promis qu'une licence pour l'exploitation du brevet CCC lui serait accordée, il se jeta à l'eau et la société TEKNOWAN S.A. vit le jour le 28 août 1990. Tout est bien qui finit bien, pourrait-on penser. Ce serait une erreur. En effet, trois entreprises restent en lice, désirant toutes exploiter le brevet. Faut-t-il trancher ? Et qui doit le faire ? Problème épineux qui ferait frémir d'inquiétude tout responsable digne de ce nom ! Les décideurs furent d'avis qu'il appartenait aux industriels de couper la poire en trois, et de définir entre eux les règles du partage (tragique exemple de méconnaissance, par des fonctionnaires, de la psychologie en vigueur dans l'industrie).

Pour ce faire, une réunion fut organisée, le 11 octobre 1990, au siège du CNRS, qui mit en présence NOLE, HEVVY et TEKNOWAN ainsi que nos propres décideurs. Puisque j'en étais, j'assume au passage ma part personnelle de responsabilité. La discussion qui s'en suivit fut mémorable mais seuls ceux qui y participèrent pourront jamais l'apprécier pleinement. Aussi, mon compte-rendu ne pourra en être que très schématique. La position la plus facile à défendre était celle de la société HEVVY, prête à se contenter du marché nord-américain. Sa sagesse lui permit de pouvoir signer sa licence le 31 octobre 1990. En revanche, NOLE, qui n'était intéressée au départ que par les marchés militaires dans le reste du monde, se mit à revendiquer les applications civiles, domaine que TEKNOWAN entendait bien se réserver. Il s'ensuivit une situation de blocage dans laquelle nous sommes toujours empêtrés.

Aux dernières nouvelles, la situation peut se résumer ainsi :

·         HEVVY, une société américaine, est le seul licencié d'une technologie française, mais ne dispose pas encore de tout le savoir-faire. Aux Etats-Unis, des produits concurrents viennent malheureusement d'être mis sur le marché par d'autres sociétés.

·         La licence à la société italienne RIGOL n'est toujours pas résiliée. On assure que c'est néanmoins imminent.

·         La société française NOLE est toujours intéressée. Sa décision est attendue d'un jour à l'autre.

·         TEKNOWAN, créée par l'inventeur de la technologie CCC (et donc, son détenteur) n'a toujours pas obtenu la licence, et n'a donc aucun droit légal de fabriquer et de vendre. Finira-t-elle par commettre l'irréparable ?

·         Notre valse hésitation continue. Le feuilleton aussi.

Beaucoup d'erreurs ont été commises par tous les protagonistes de la conduite de ce dossier, mais la plus grave est sans doute celle d'avoir voulu commencer à construire l'Europe en 1987. Il eut mieux valu attendre paisiblement le mois de décembre 1992.

Suite des péripéties depuis la version 4.3 :

·         26 janvier 1991 : résiliation de la licence à RIGOL qui, depuis, a été mise en liquidation.

·         14 octobre 1991 : une licence non exclusive pour l'Europe est accordée à TEKNOWAN.

·         18 mars 1992 : abandon, par NOLE et CELIS, seules entreprises françaises encore en lice, de toutes leurs prétentions sur la technologie CCC.

·         6 avril 1992 : accord TEKNOWAN-LMA relatif à la cession du savoir-faire par le CNRS à la société de Ch. Emrac.

·         31 octobre 1992 : résiliation, par le CNRS, de la licence à la société HEVVY (signée exactement deux ans auparavant).

·         Une société américaine qui avait mis sur le marché un produit concurrent de (mais moins performant que) celui de TEKNOWAN aurait arrêté sa production.

·         1er décembre 1992 : accord de principe du CNRS pour une licence exclusive mondiale à venir pour TEKNOWAN.

Ch. Emrac devient enfin officiellement devant les hommes (il l'était déjà devant Dieu) le PDG de TEKNOWAN.

·         Novembre 1993 : la licence évoquée près d'un an auparavant va bien finir par arriver. TEKNOWAN a neuf salariés.

Tiens bon, petit ! Tu t'approches peu à peu de la victoire finale.

Pourvu que ça dure.

·         15 février 1994 : le CNRS soumet – enfin ! – à TEKNOWAN une proposition écrite en vue d'une licence exclusive mondiale. TEKNOWAN se propose de faire traîner un peu histoire de gagner du temps et de ne pas alourdir inconsidérément sa trésorerie. Braves petits !

·         Janvier 1995 : TEKNOWAN n'est plus pressée pour signer sa licence. Elle a dix salariés, plus un CIFRE et un consultant du CNRS ; en supplément, elle utilise les services de deux commerciaux rémunérés à la commission. Son chiffre d'affaires pour l'année écoulée a été de 3,5 MF. Ce n'est pas encore Byzance mais ce n'est plus la Bérézina.

·         Mai 1996 : TEKNOWAN a quinze salariés.

Cette fois, nous y sommes, et bien que l'avenir soit par définition imprévisible – des incidents ou accidents de parcours étant toujours possibles, touchons du bois ! – on est en droit de penser que le bout du tunnel est en vue.


Épilogue

Nous voici arrivés au terme de ce scherzo. Je ne suis plus actuellement CMI du CNRS. Les idées que j'ai eu l'audace de défendre avant l'heure, en particulier celles concernant la création d'entreprises par les chercheurs, y sont probablement pour quelque chose. Je les ai défendues parfois avec véhémence, mais toujours – j'ai la faiblesse de le croire – dans le respect des autres.

Nul n'étant indispensable, la valorisation au CNRS continue. Mon successeur a été nommé fin novembre 1990. La passation des pouvoirs (le mot possède une étrange saveur pour quelqu'un qui a toujours été convaincu de n'être que l'un des irresponsables de la valorisation) a eu lieu le 6 décembre 1990, soit cent-quatre-vingt-dix-neuf ans jour pour jour après les funérailles de Mozart, ce qui n'a bien sûr aucun rapport. Si ce n'est peut-être, pour moi, une toute petite, et simple, valeur symbolique.

Ma la commedia non è finita !


SI J'ÉTAIS RESPONSABLE DE LA VALORISATION

(ou plutôt, pourquoi je ne le serai jamais)

 

Quand le téléphone a sonné, j'ai immédiatement décroché. Habituellement je m'enfonce en même temps dans mon fauteuil, mais là, je suis resté debout, touché par une sorte de respect prémonitoire. La voix était courtoise mais très ferme ; après s'être assurée de mon identité, elle m'annonça de façon péremptoire : "je vous passe..."

C'était lui, j'ai tout de suite reconnu sa voix.

- Bonjour, je pense que vous allez bien. Vous savez que je procède actuellement à des consultations ; j'aimerais bien que vous acceptiez de faire partie de l'équipe que je suis en train de constituer.

Je me suis assis. Il a dû le sentir, et a marqué un temps mort. J'en ai profité :

- A la Direction Générale ?

- Non, non, j'ai déjà quelqu'un à la Direction Générale ; je pensais plutôt à la Valorisation.

- Ah, bien sûr, je...

- J'ai lu une partie de ce que vous avez écrit et je connais bien les positions que vous défendez, les propositions que vous formulez au nom de tous ces chercheurs que vous représentez.

- Je n'étais que leur porte parole (sur le moment, je ne me suis même pas aperçu que je parlais déjà à l'imparfait).

- Certes. Je connais bien vos idées. Votre analyse sur la valorisation est très intéressante, votre opposition au rôle excessif joué par les administratifs est bien argumentée et tout à fait justifiée, mais pour l'instant, il faudra laisser les choses en l'état. Vos propositions sur la création d'entreprises par les chercheurs méritent d'être étudiées de très près et chiffrées. Il nous faut absolument réduire les dépenses de valorisation.

- Vous voulez dire le coût du traitement de chaque dossier de valorisation ?

- Oui, si vous voulez. Et aussi augmenter les recettes.

- En augmentant le nombre de contrats et de dossiers de valorisation ?

- Euh, pourquoi pas, mais pas dans l'immédiat. Nous verrons plus tard si les conditions sont réunies.

- J'ai fait des propositions visant à accroître la marge de manœuvre des chercheurs et donner plus de responsabilités aux directeurs de laboratoires.

- Oui, je sais, mais le statut des chercheurs n'est pas votre domaine ; la situation est très complexe ; c'est pourquoi nous ne pourrons rien précipiter. Vos propositions sur la création d'entreprise méritent aussi qu'on s'y réfère. Je sais que vous vous méfiez des grands groupes industriels auxquels vous reprochez de ne pas faire ce qu'il faudrait. Vous voyez, vous avez du pain sur la planche, et je ne vous ai pas parlé des CRITT, des conseillers technologiques, des GIP, des ADER, des associations diverses et variées, des consultants, des mises à disposition, des règles sur le cumul, de la politique des universités, de leurs filiales, de l'ANVAR, du comité national, du Ministère. Autant de sujets qui méritent, eux aussi, toute notre attention.

- Il faudrait...

- Oui, vous voyez il nous faudra, en peu de temps, produire un effort considérable... (il a retenu sa voix puis a appuyé)... d'information, d'explication. Dire et redire aux chercheurs que nous sommes à leurs côtés, que nous partageons leurs problèmes, mais en même temps leur faire comprendre toute la difficulté de prendre les mesures qu'ils souhaitent... et que nous souhaiterions aussi, bien entendu...

J'ai senti que nous arrivions au terme de notre entretien. Il a conclu :

- Bien sûr, je comprends que vous vouliez réfléchir. Je vous rappelle dès que possible.

Il a raccroché.

Quand la sonnerie a retenti à nouveau, je me suis précipité sur le téléphone, mais stupeur, c'était le réveil qui pour la seconde fois tentait de me tirer de mon lit.

J'ai refusé d'obtempérer, la valorisation pouvait bien attendre.

Plagiat éhonté d'un article de
Roland Boucabelle, président de la MGEN,
dans MGEN 13, n°19, mai 1992, p.3.


Épigraphe pour un livre condamné

Chercheur paisible et sympathique,
Pauvre et naïf homme de bien,
Jette ce livre saturnien,
Qui sent le soufre et sarcastique.

Si tu n'as fait ta rhétorique
Chez Coluche, ce vieux copain,
Jette ! Tu n'y comprendrais rien,
Ou tu me croirais hystérique.

Mais si, cherchant la vérité,
Tu veux plonger dans les arcanes,
Alors, laisse-moi te guider,

Et si les autres me condamnent,
Accorde-moi ton amitié :
Lis-le, pour apprendre à m'aimer.

Pastiche
du poème homonyme
de Charles Beaudelaire
dans les Fleurs du Mal


ANNEXES

 Sauf indications contraires, il s’agit d’articles tirés de la littérature
et donc se trouvant dans le domaine public.

Certains ont été ressaisis sur traitement de texte (il ne s’agit donc pas de fac-similés absolument identiques) afin de les rendre facilement insérables dans le présent document et par là plus accessibles au lecteur.


Le moyen que j’ai ainsi choisi ne doit pas être regardé comme un piratage ou une quelconque attaque contre les ayants droit de ces textes.

Lorsque leurs auteurs sont identifiés, je reconnais bien évidemment à ces derniers tous les droits de copyright qui leur appartiennent.

Mais je n’ai pas trouvé d’autre moyen pour permettre à mes lecteurs de profiter pleinement du caractère extraordinairement illustratif et parfois comique de ces documents, dont la plupart seraient, à cause de leur parution dans des revues très spécialisées ou trop anciennes, ou en vertu de leur caractère plus ou moins confidentiel, difficilement accessibles à une frange importante de mes lecteurs.

Annexe 1

Annexe 2

Annexe 3

Annexe 4

Annexe 5

Annexe 6

Annexe 7

Annexe 8

Annexe 9

Annexe10

Annexe 11

Annexe 12

Annexe 13

 

Les annexes non disponibles en ligne, et/ou d'accès difficile, et portant les n° 5, 6, 8 et 11,
doivent m’être demandées personnellement
par e-mail.
Je me ferai un plaisir de les expédier par la poste.


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