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Comité Cambodgien de Vigilance
pour l'application de l'Accord de Paris sur la paix au Cambodge du 23 octobre 1991

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Introduction
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Mise en oeuvre
Elections générales
Patrimoine national
Constitution

LIVRE BLANC : L'ACCORD DE PARIS ET SA MISE EN OEUVRE

LE PATRIMOINE NATIONAL KHMER

INTRODUCTION
I. LE PATRIMOINE TERRITORIAL
1. Et du côté ouest ?
2. La leçon d'une promesse de garantie
3. Devoir et responsabilité de l'ONU
II. PATRIMOINE DEMOGRAPHIQUE
1. Souveraineté
2. L'APRONUC et les colons illégaux
3. L'APRONUC et le racisme au Cambodge
4. Situation actuelle
5. Héritage
III. LES PATRIMOINES ECONOMIQUE ET CULTUREL
1. Patrimoine économique
2. Patrimoine culturel

INTRODUCTION

Comme tout autre peuple attaché à sa nation, le peuple cambodgien, continuellement spolié, s’est battu encore ces dernières décennies pour préserver son patrimoine national menacé par l’expansionnisme vietnamien. Son âpre et légitime combat contre l’agression et l’occupation vietnamienne a été reconnu et soutenu par la communauté internationale et l’ONU.

L’Accord de Paris arrêta la lutte de libération nationale pour rétablir la paix, et en échange, garantit solennellement entre autres la pérennité du patrimoine cambodgien. Il donne un rôle central (Chap. II) à l’APRONUC qui agira dans le plein respect de la souveraineté nationale du Cambodge afin de maintenir, préserver et défendre la souveraineté, l’indépendance, l’intégrité et l’inviolabilité territoriales, la neutralité et l’unité nationale du Cambodge.

Il stipule donc de façon claire et indéniable, le devoir et la responsabilité de l’ONU, de l’APRONUC et des Puissances signataires, dans la garantie du droit du peuple cambodgien à la totalité de son patrimoine, en particulier les patriotes combattants, ont accordé une totale confiance à cette garantie.

En quittant le Cambodge en Septembre dernier, l’APRONUC a-t-elle accompli sa mission dans ce domaine ?

Souhaitant sincèrement le succès complet de l’application de l’Accord, parce que c’était l’ultime recours viable pour notre pays, les Cambodgiens réunis au sein du CCV ont apporté leurs contributions constructives et pragmatiques avec toute l’énergie de désir de la paix et de la stabilité nationales. Avec également toute la vigilance lucide et positive, parce que instruits par les leçons de tant d’accords internationaux dévoyés, surtout des malheureux accords non appliqués intervenus en Indochine

Hélas, très tôt, nous avons perçu des signes inquiétants d’une mise en œuvre non conforme aux impératifs de la situation locale concrète, ni à l’esprit de l’Accord. Le département Patrimoine du CCV a alors émis une étude, contenant des constats des faits, assortie de propositions à l’intention de l’APRONUC et du CNS (Cf. RDT/CCV-2 p 12 à 18).

A la lumière des résultats d’aujourd’hui, nos appels et propositions ont-ils été fondés et entendus ? Dans quelle mesure l’APRONUC a-t-elle tenu compte des avis et propositions des nationaux cambodgiens bien au fait des réalités de leur pays ? Souvent menées à l’envers de nos suggestions, ses actions ont-elles été efficaces et bénéfiques ? Ont-elles atteint les objectifs de l’Accord ?

Il est trop tôt pour pouvoir dresser un bilan complet, pour la simple raison qu’il n’y a pas encore de liberté totale sûre pour une enquête indépendante en profondeur, et que des Puissances maintiennent leur pression sur la politique cambodgienne. Cependant, les informations disponibles et des témoignages de première main sont abondants pour une vision globale correcte.

Notre étude du 24/4/92 sur la préservation du patrimoine s’est attachée aux quatre volets majeurs : territorial, démographique, économique et culturel. Nous allons les passer en revue dans le même ordre - et succinctement pour ne pas trop alourdir ce dossier - avec l’accent mis sur le vital et le stratégique : le patrimoine territorial et démographique.

LE PATRIMOINE TERRITORIAL

Nous avons indiqué dans notre contribution technique (RDT/CCV-2 p 12 à 18) les annexions territoriales avec occupation des terres, déplacements des frontières, creusements des canaux, élévation des digues et plantation des barrières de bambou pour servir de nouvelles lignes frontalières..., opérés par le Vietnam. Nous avons fait part des modifications de frontières maritimes aux dépens du Cambodge, ainsi que l’incrustation progressive et continue illégale des populations vietnamiennes visant à repousser les Cambodgiens loin de leurs terres dans le but de faire avancer la frontière vietnamienne. Ailleurs, c’était des colonies de peuplement massif en zones spécifiques concentrées en tâches de léopard d’encerclement.

Nous avons demandé que ce problème d’intégrité territoriale soit traité et résolu de façon prioritaire par l’APRONUC et le CNS, et qu’en toute urgence les traités léonins imposés par la puissance occupante vietnamienne à l’illégal Etat du Cambodge soient déclarés nuls et non avenus.

Où en est-on aujourd’hui ?

On peut dire que pratiquement rien n’a été réalisé par l’APRONUC pour rétablir l’intégrité territoriale du Cambodge, ni sa souveraineté. Aucun morceau de frontière violé n’a été restauré. Pire, le grignotage a continué. Aucun traité illégal n’a été dénoncé. Aucune attention digne de la gravité du problème n’a été remarquée. Les plus hautes personnalités actuelles du Cambodge, excepté les dirigeants du PPC, le reconnaissent et s’en préoccupent publiquement.

Le 19 Juillet 1993, Samdech Preah Norodom Sihanouk écrit à Samdech Krom Luong, la veille de la visite de ce dernier au Vietnam :

" A Hanoi, je vous pris de demander au Gouverneur de la R.S du Vietnam de bien vouloir replacer les bornes frontalières du Vietnam avec le Cambodge sur la ligne frontalière Vietnamo-Cambodgienne telle que la R.D du Vietnam et le FNL du Sud Vietnam l’avaient officiellement reconnue dans les années 1960 et 1970 : dans certains endroits, ces bornes frontalières, dans les années 1980, ont été déplacées bien à l’intérieur du territoire du Cambodge. Ces " portiques " doivent être démolis s’il apparaît qu’ils ne se trouvent pas exactement sur la ligne frontalière Vietnam-Cambodge prévalant jusqu’à la veille du Coup d’Etat de Lon Nol-Sirik Matak.

Quant à la frontière maritime Vietnamo-Cambodgienne, elle ne doit être différente de celle reconnue formellement par la R.D du Vietnam et le FNL du Sud Vietnam dans les années 1960. " (BMD Juillet-Août-septembre 1993)

Dans son mémorandum du 25/10/93, M. Son Sann s’est préoccupé de la même question :

Tous les traités et accords, secrets ou non, passés sous l’occupation vietnamienne, doivent être déclarés nuls et non avenus, en particulier ceux concernant nos frontières, et l’entrée libre des Vietnamiens au Cambodge.

L’on sait que la bonne volonté pleine d’humilité et de courtoisie de Samdech Krom Luong le Prince Ranariddh a essuyé un refus catégorique sous la forme de l’habituelle commission d’études ou d’enquête, avec obligation de résoudre d’abord le problème des 30 000 illégaux colons de peuplement vietnamiens fuyant à la frontière sous la colère des Cambodgiens spoliés ou des Khmers Rouges. Le premier contact avec le Vietnam d’un Premier Ministre Cambodgien de l’Après APRONUC n’a pas adouci l’intraitable volonté hégémonique vietnamienne.

Mais c’est parmi le peuple et dans le public, à travers de sa presse de tous les jours, que résonne l’écho de la colère bouillonnante et de l’amertume générale nées d’une spoliation flagrante et insolente, inadmissible en cette fin de 20ème siècle, dans le silence tranquille, hypocrite des Grands (*) supposés intervenir pour rétablir le droit et la justice internationale. Dans la masse des cris de frustration et de peur quotidienne de perdre le pays, relevons quelques échantillons.

Dans un reportage de San Nara, illustré par une photographie de sa présence à la borne frontière Cambodge-Vietnam à l’extrême Est de la province de Kompong Cham, le journal CHAKRAVA du 4/10/93 écrit, sous le titre : La frontière qui met le peuple en colère :

Le problème de la frontière est un sujet infini. La population en grand nombre est venue se plaindre à nous, lors de notre visite à la frontière.

La population de Trapeang Pring (Srok Ponhea Krek, Kompong Cham) nous racontait : " C’est ici la voie d’accès. Les Yuons ont déplacé la frontière de 10 Km, et ont planté des bambous sur une digue de 2,5 m élevée récemment, et qui sert de nouvelle frontière depuis 1988. "

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(*)Nous n’avons jamais entendu les grands ténors des Forums Internationaux (et nous souhaitons être dans l’erreur) ni les personnes concernées par le problème cambodgien parler publiquement de l’annexion territoriale par le Vietnam. Tous se sont tus pudiquement comme s’ils ne savaient pas.

Ils ont ajouté : " Du temps de Sangkum, temps de Samdech Euv, nos terres étaient là-bas " (ils nous ont pointées de leur doigt les terres qui se trouvaient à perte de vue). " Il y a des endroits ou ils ont avancé leur frontière jusqu’à 40-50 Km des Phum Prey Khol, Bos Chek,... jusqu’à Chey Suos, Saam Ampuk. "

Pour ce qui est des méthodes d’accaparement des terres, le journal poursuit : Les villageois se plaignent : " Là où notre population va cultiver, des soldats et des autorités vietnamiennes viennent confisquer les bœufs et les buffles, en nous accusant d’avoir franchi illégalement la frontière pour travailler illégalement sur le territoire vietnamien. " " Quoi, leur terre ? Alors que je l’ai cultivée là toute ma vie, depuis mon enfance jusqu’à mon âge actuel " explosa un paysan qui ajouta : " ils m’ont menacé en disant que leur terre (vietnamienne) commence à l’Est du Mékong, et qu’ici, il n’y a pas de terre cambodgienne ".

Et la population du lieu de conclure :

" Nous en parlerons aux dirigeants de notre pays de prêter une grande attention à notre problème, sinon nous n’aurons plus de terre (...)

Nous implorons Samdech Euv, Samdech Krom Luong et le Co-président de nous aider, autrement nous n’aurons plus rien, car nous ne vivons que par les terres, héritages de nos ancêtres. "

Ce qui se passe dans la province de Kompong Cham doit être quintuplé dans les régions désertes, montagneuses du Nord-Est (Mondolkiri, Rattanakiri, Stung Treng), parmi les anciens repaires Viêt-cong, régions qui mènent à l’aboutissement de la piste Ho Chi Ming.

L’hebdomadaire La VOIX DE LA JEUNESSE KHMERE N° 3 du 19/4/93 sous le titre la route de la souffrance raconte le constat lors d’un voyage de l’un de ses lecteurs dans le Nord-Est :

" Nous avons fait notre voyage en voiture avec des unités provinciales pour nous rendre à Mondulkiri. Nous sommes passés par Saigon, parce que les pistes chez nous étaient difficiles et puis il n’y avait pas de sécurité. Après 600 Km de route, nous étions surpris et étonnés des installations de nature stratégique comme si les garnisons étaient en état d’alerte constante en direction du Cambodge. Ces garnisons comprenaient beaucoup d’effectifs vietnamiens, jusqu’à environ 600 soldats. J’ai questionné la dame vietnamienne qui nous avait demandé à profiter de notre voyage. Elle m’a dit que ces postes stratégiques étaient destinés à protéger le régime de Hun Sen.

Arrivés à Mondulkiri, nous assistions à des scènes extraordinaires : la coupe infernale des arbres et leur expédition vers le Vietnam avec la complicité de trois groupes de gens (les bandits, les militaires vietnamiens et les soldats du gouvernement de Phnom Penh. La population s’élevait contre les taxes et impôts prélevés par les Vietnamiens qui prétendaient que cette "terre était une zone libérée". Nous l’écoutions avec émotion et tristesse, et elle ajoutait : " nos dirigeants ne voient pas cela ". Autre surprise amère : alors que nous nous engagions sur une piste, nous étions arrêtés par des soldats vietnamiens, nous avions dû nous mettre à genoux pour supplier d’avoir la vie sauve. Finalement la grâce nous était accordée. Nous sommes terrifiés de nous apercevoir que sur notre propre terre, nous sommes interdits de circulation. En fait, ces endroits sont des lieux secrets où ceux qui sont entrés, ne reviendront pas (...)

Un tel destin n’est pas unique à Mondolkiri. Il en est de même des provinces de Kratié, Stung Trèng, Rattanakiri. Il y a des contrôles de ce genre, et ils creusent des tranchées partout. Ceci me fait penser à une phrase Le Duc Anh président du Vietnam qui dit : " Si je n’arrive pas à prendre le Cambodge, je cesserai d’être un homme politique ".

Cette histoire est véridique, nous l’avons nous-mêmes vécue en juillet 1992. Alors, chers compatriotes, faites attention à la route de la "Grande Solidarité" ! "

Que se passe-t-il à Takeo, Svay Rieng, Prey Veng, Kandal, Kampot ? La même chose : déplacement des lignes frontalières et des portiques de passage douanier, creusement de nouveaux canaux de démarcation, colonies de peuplement,... Déjà dès le 19 mars 1990, à Beijing, devant 73 ambassadeurs, le Prince Norodom Sihanouk a dénoncé, cartes et photos à l’appui, l’annexion territoriale de grande envergure par le Vietnam. Mais depuis, Hanoi travaille à consolider son avancée, et surtout à faire diversion avec le mouvement de ses illégaux colons : multiplier les problèmes au Cambodge, le submerger dans un vaste plan d’encerclement démographique, pour gagner du temps et imposer un fait accompli.

Il n’y a qu’à parcourir les journaux cambodgiens d’aujourd’hui pour voir renouveler l’obsession de ce problème lancinant. Des Cambodgiens de ces provinces en parlent avec mille détails. Le sentiment de frustration, d’humiliation, de spoliation, d’agression permanente gronde et monte.

Rien qu’en étant un instant de passage à Prey Veng, accompagnant M. Akashi dans son bref tour d’inspection, le célèbre auteur de Sideshow, William Schawcross, a pu relever de première main, le témoignage concret de l’annexion (Time, 28/12/93) :

Dans une petite maison en bois sur une digue entre les champs de riz, un officier du Bengladesh révéla qu’après son invasion de 1979, le Vietnam a déplacé sa frontière ici, à quelques 1300 mètres à l’intérieur du Cambodge, coupant les villageois de leur propre pays. Il a aussi montré qu’il y avait tellement de chemins à travers les bois et les champs que la frontière était impossible de contrôler.

Dans la ville de Svay Rieng, il y avait juste le temps pour un briefing rapide mais optimiste de la part de l’administrateur civil de la province. Quand Philippe Ramaya tenta de parler de l’intimidation des partis par les fonctionnaires du SOC, il fut écarté.

On le voit, M. Akashi ne voulait pas avoir de nouvelles gênantes. S’il s’était intéressé plus au rétablissement des frontières, et pas seulement aux élections, il se douterait bien que, sans la coopération des Cambodgiens, il ne serait pas possible d’endiguer les flots des illégaux. Mais le lointain avenir du Cambodge le préoccupait moins que l’immédiat succès des élections

Pour en arriver ou plutôt en rester à cette situation, qu’a exactement entrepris l’APRONUC pour les questions des frontières, d’intégrité territoriale ?

Le rapport final du Border Control Unit (BCU) nous livre des enseignements précieux et révélateurs :

L’objectif du BCU est de fournir un guide au gouvernement cambodgien pour le contrôle des frontières pour la période post-Apronuc. Le BCU fut créé en février 1993 pour coordonner et diriger ces fonctions liées à la partie civile du mécanisme de contrôle de frontières dans son ensemble (immigration, douane, protection des ressources naturelles nationales). Ce mécanisme est construit sur les pratiques existantes des quatre factions. Le mécanisme de contrôle de l’APRONUC se concentre sur une tâche plus large de reconstruire des structures administratives et d’établir des normes nationales de sorte que le nouveau gouvernement cambodgien puisse gouverner dans l’intérêt du peuple cambodgien.

Pour cette mission, 21 border control officers (BCO) ont été déployés, avec peu de support logistique, et soumis aux violences et menaces. Ils ont travaillé de mars à mi-septembre 1993 avec les structures existantes, contrôlé l’immigration (1 600 Vietnamiens entrants et 5 000 sortants, dont probablement (!) beaucoup de Vietnamiens), et veillé à la préservation des ressources naturelles selon le moratoire du CNS. Les BCO assistent les préparations des élections, et ont contribué à la stabilité durant la déclaration des zones autonomes de Samdech Euv (Sécession des fidèles à M. Hun Sen). Ils ont aussi assisté les opérations de retour des réfugiés. Les BCO notaient également que leur présence empêchaient les Thaïlandais d’abuser du territoire cambodgien.

En somme, après maints protestations et appels à des mesures d’urgence en vue de restaurer l’intégrité territoriale et la souveraineté nationale, on a fini par voir l’APRONUC créer, au demeurant à une date très tardive, les BCU dont le rôle était, non de rétablir les frontières ou de contrôler le retrait des forces étrangères, mais de préparer un dossier pour apprendre au futur gouvernement cambodgien comment fonctionnent les postes de douane et de police de frontière.

Les Cambodgiens qui attendaient de l’APRONUC qu’elle se penche sur les problèmes d’intégrité territoriale, qu’elle travaille à lui restituer les terres annexées, volées par le Vietnam, ou éventuellement empiétées par la Thaïlande, doivent en avoir pour leur frais. Maintenir, préserver et défendre l’intégrité et l’inviolabilité territoriale n’était qu’une simple clause de style diplomatique... si ce n’était pas un mensonge.

En clair, pour l’APRONUC, il n’y avait rien à faire avec les frontières. Et elle n’a rien fait. Sur la carte où elle dessinait ses 33 postes frontaliers de contrôle, il était écrit :

Les frontières et les noms montrés sur cette carte, n’impliquent pas l’officielle reconnaissance ou acceptation par les Nations Unies.

Autrement dit, l’APRONUC ne préjugeait pas de la réalité des frontières où elle était supposée être installée, ou qu’elle était supposée rétablir.

ET DU COTE OUEST ?

Quand nous parlons des annexions des terres cambodgiennes par le Vietnam, certains nous objectent que la Thaïlande est également en train de prendre des morceaux de notre terre ; mais cela, comme si on voulait excuser une annexion par une autre, un crime par un autre.

En clair : " vous n’avez rien à dire du Vietnam puisque la Thaïlande vous dépèce de l’autre côté également. "

Nous entendons réagir fermement à toute violation de nos frontières d’où qu’elle vienne. Nous suivons de très près les rapports sur l’empiétement éventuel à l’Ouest, notamment pour ce qui est des frontières maritimes souvent en rapport avec les zones de recherche ou d’exploitation pétrolières aujourd’hui très actives.

Mais entre la politique proclamée de la Thaïlande qui souhaiterait un Etat tampon pour sa propre sécurité et la politique internationaliste vietnamienne d’invasion et d’occupation militaire, en vue d’une Fédération Indochinoise fièrement déclarée (" l’Indochine est indivisible " clamait Nguyen Co Thach), avec une forte dose simultanée d’annexions et d’injections de colonies de peuplement, on est obligé de constater non un simple contraste de nuances, mais une réelle différence de nature. Le Cambodge n’a alors pas de choix dans l’adoption de ses priorités et urgences.

Par ailleurs, l’incapacité ou le manque de volonté de l’APRONUC pour résoudre nos problèmes de frontières à l’Est n’était pas sans incidence sur l’émergence des problèmes à l’Ouest. Reste pertinente, l’analyse de certains spécialistes selon lesquels l’agression, la longue occupation, la politique d’annexion du Cambodge par le Vietnam pouvaient fournir à la Thaïlande un bel alibi pour ne pas assister sans réagir pareillement, au dépeçage du Cambodge par son rival historique.

La volonté hégémonique du Vietnam est un véritable détonateur d’explosif pour ce petit pays coincé entre deux grands voisins. La politique d’annexion permanente et la non-paix qu’elle entretient, favorisent l’évolution dangereuse vers la compétition pour le partage du Cambodge. C’est là l’urgente équation à résoudre pour les Cambodgiens.

L’ancien ambassadeur de Thaïlande au Cambodge, Sunai Baniasiriphant, a appelé récemment à établir d’urgence un comité conjoint pour la démarcation des frontières (CAMBODIA TIMES 6/12/93).

" Pour renforcer les bonnes relations bilatérales entre les deux pays, il devrait y avoir un organe pour examiner, négocier et résoudre les disputes des zones frontalières. Cette attitude symbolisera la bonne volonté et la sincérité de la Thaïlande, et prouvera que la Thaïlande n’a aucune intention de prendre des terres au Cambodge " dit l’ambassadeur.

Une initiative à encourager et un exemple à faire suivre.

LA LECON D’UNE PROMESSE DE GARANTIE

Il était évident qu’en vue de vérifier, selon les termes de l’Accord, le retrait de toutes les catégories de forces étrangères, il fallait d’abord savoir où étaient les frontières, surtout quand on avait affaire à un occupant coriace. Dans notre contribution du 24/4/93, nous avons donc demandé avec insistance à l’APRONUC de restituer en priorité l’ancienne frontière, et de démanteler les occupations illégales. Et pour cela, il était logique que l’APRONUC et le CNS coopèrent pour mettre en place des autorités quadripartites de contrôle. En effet, on ne pouvait un instant, imaginer que quelques personnels et casques bleus disparates de l’APRONUC, connaissant mal le terrain, pourraient seuls contrôler les frontières.

Mais nos appels et propositions ont été superbement ignorés, parce que certaines grandes puissances ont une politique autre.

A présent, que la question d’intégrité territoriale reste entière, il incombera aux Cambodgiens de se débrouiller. L’APRONUC s’en est lavée les mains et certaines puissances également.

Une leçon sans doute très amère pour les Cambodgiens : les frontières sont à ceux qui les défendent.

Il n’empêche que, pour leur future démarche pour récupérer leur droit et leur patrimoine, les Cambodgiens doivent y voir clair. Leur confiance en la promesse internationale devrait tenir compte de cette expérience. En tout cas, ils ne doivent pas négliger le développement de leur propre potentiel, y compris la force. Cette transition untaciste qui, disons le, a des côtés positifs, comporte des effets pervers complexes du fait du manque de volonté politique de certains Grands, analysé déjà abondamment dans les chapitres précédents. Une vigilance redoublée reste indispensable.

DEVOIR ET RESPONSABILITE DE L’ONU

L’APRONUC s’est retirée, auto satisfaite de la tenue de ses élections, mais laisse derrière elle de nombreuses déceptions, et le souvenir d’un Accord en grande partie, dévoyé. Les conséquences de cet échec continuent de se faire jour et bientôt s’aggraveront encore, notamment en ce qui concerne ces brûlantes questions d’intégrité territoriale et de souveraineté nationale, garanties dans l’Accord. De ce fait, l’ONU et les puissances restent liées à leur mission inachevée, et n’ont pas été d’autant dégagées de leurs responsabilités et devoirs envers le Cambodge. Certes, il appartient aux Cambodgiens de prendre ses responsabilités, mais il faut rappeler que le peuple cambodgien a renoncé à sa juste lutte en échange des engagements précis, moraux et matériels.

PATRIMOINE DEMOGRAPHIQUE

SOUVERAINETE

Un pays, c’est d’abord les hommes ; les hommes maîtres de leur terre et de leur destin. La richesse des Cambodgiens, c’est son patrimoine démographique unitaire et équilibré vivant en bonne entente, dans la tolérance bouddhique. L’APRONUC devait garantir cette maîtrise de l’espace national et le protéger contre les violations, les entrées illégales. C’était ce qu’a compris le commun des Cambodgiens quand on lui parlait de la garantie de la souveraineté nationale.

Alors que la situation était déjà compliquée par l’occupation militaire et civile durant de longues années, la période transitoire de l’APRONUC a été marquée par l’afflux massif incontrôlé des colons illégaux vietnamiens, venus piller sans ménagement et sans contre partie les ressources du Cambodge. Vu l’état du Cambodge, sur tous les plans, ce mouvement d’une ampleur sans précédente a été vu par tous comme extrêmement dangereux pour le pays. Et cela pour deux raisons importantes : le déséquilibre démographique suivi d’une dilution progressive de l’identité culturelle (car en général les Vietnamiens ne s’intègrent pas à la société khmère) et surtout le déséquilibre politique provoqué par la stratégie d’intégration indochinoise du Vietnam (Ho Chi Minh disait : " un Vietnamien est un combattant [pour la cause du Grand Vietnam] ")

Le CCV a alerté (RDT/CCV-2 page 15) l’APRONUC de cette invasion inadmissible, dénoncé l’atteinte à la souveraineté khmère, démontré les arrière-pensées du Vietnam dans le cadre de sa politique de destruction/submersion démographique en vue de dominer le Cambodge, et les prolongements néfastes à terme de cette situation intolérable. Nous avons même prévenu qu’il serait inévitable à ce rythme, que naisse chez les Cambodgiens un sentiment de spoliation qui pourrait tourner à la colère ou à la haine mal contenue. Hélas quelques temps après, notre avertissement s’est révélé prophétique.

Notre proposition était que l’APRONUC et le CNS s’appuient sur une administration et une force quadripartite pour prendre collectivement des mesures immédiates contre l’immigration sauvage. Une autre mesure indispensable devait être d’annuler tous les traités inégaux et illégaux et les décrets de naturalisation, imposés par le Vietnam au nom de la solidarité indochinoise. Cette proposition visait l’efficacité à travers un CNS opérationnel et la réconciliation nationale à travers des missions intégrées pour un objectif hautement national.

L’APRONUC ET LES COLONS ILLEGAUX

Comme nous avons vu plus haut, l’APRONUC et certaines puissances avaient une politique qui n’était pas exactement ce que nous attendions de l’Accord. Le CNS vidé de sa substance d’unique autorité légale, l’APRONUC agissant seule, l’édifice du contrôle efficace s’est effondré, laissant la porte ouverte aux laxisme, impunité et débordement. Le nombre des colons vietnamiens grimpait alors en flèche (entre un et deux millions selon les sources).

Comme les BCU n’étaient mis en place que plus tard, en mars 1993 (un an et demi après l’entrée en vigueur de l’Accord), le Vietnam a eu largement le temps d’injecter ses soldats paysans. De toute façon, les BCU, malgré leur bonne volonté, n’avaient que des rôles restreints, limités par leurs faibles moyens logistiques et leur peu d’expérience des lieux. (voir article de William Schawcross déjà cité). Ici comme ailleurs, l’obsession électorale mobilisait toute l’énergie de l’APRONUC ; la souveraineté nationale était pour plus tard.

On ne sait toujours pas si c’était une conviction ou un alibi pour cacher l’incapacité à gérer et résoudre cet énorme problème. Curieusement, l’APRONUC et une certaine presse n’ont voulu voir dans ces flots déferlants que de pauvres innocents venus chercher du travail, profitant de la pluie des dollars de l’ONU. J.C. Pomonti les a comparés aux maghrébins. Du même coup, les Cambodgiens sont devenus des intolérants. Parce qu’ils ont voulu défendre l’intérêt de leur pays, leur travail et la sécurité de leur nation ; ils ont été perçus comme racistes, xénophobes. On les a même accusés d’épuration ethnique.

Oubliées la souveraineté cambodgienne et l’illégalité des entrées clandestines. Oublié l’état de faiblesse des hommes et de la société cambodgienne se relevant des ruines de la guerre qui risquait d’être assommée par la compétition massive des gens valides. Oublié le fait que ces immigrants s’incrusteront et pèseront de tout leur poids sur une société handicapée qui aura du mal à se redresser. Les défenseurs de l’invasion ne manquaient pas d’arguments.

- Ces colons sont des anciens du Cambodge. Mais ils n’étaient pas deux ni un million. Et comment les vérifier ? Depuis 20 ans qu’ils ont quitté le Cambodge, ils ont dû s’installer ailleurs ou mourir pour au moins moitié. Et que dire des jeunes prostituées ?

- Ces Vietnamiens font le travail que ne font pas les Cambodgiens. Peut-être que la guerre a empêché les Cambodgiens de pratiquer certains métiers, mais beaucoup seraient aussi capables si les patrons les employaient. Mais souvent, les entreprises étaient aux mains des patrons d’ailleurs. Du temps du Général Lon Nol, quand les Vietnamiens étaient partis du Cambodge, l’économie cambodgienne marchait bien avec les techniciens cambodgiens.

- Ces travailleurs sont venus parce qu’il y avait beaucoup de dollars de l’APRONUC. l’APRONUC partie, sont-ils repartis ? La preuve flagrante est que les 30 000 qui avaient fui la peur des Khmers Rouges étaient renvoyés par le Vietnam au Cambodge.

- Enfin, Droit de l’Homme. Soit. Mais le droit du peuple cambodgien existe également. Pour une plus faible proportion d’immigrés, la riche France ou la riche Italie rejette les immigrés. Pourquoi le pays le plus pauvre du monde a-il-été obligé de supporter l’invasion des nationaux d’un voisin plus riche que lui ? Le Vietnam est 3ème exportateur de riz.

- mais le Vietnam a 60 millions d’habitants. Où est alors la souveraineté d’un Etat ?

L’APRONUC ET LE RACISME AU CAMBODGE

Une fois écartée l’idée de restaurer à tout prix la souveraineté du Cambodge vis à vis des colons illégaux, et ce dans la perspective de la stabilité future du Cambodge, la façon dont l’APRONUC voit ces colons diverge de celle des Cambodgiens qui, hantés par l’histoire ancienne, récente et vécue présentement, redoutent le renouvellement des expériences amères. En travaillant à protéger les illégaux, sans résoudre les problèmes de fond cambodgiens, l’APRONUC a dépensé beaucoup d’énergies sans laisser d’empreintes durablement grandioses au Cambodge. M. Akashi connaît certainement l’histoire du Cambodge dans ses relations toujours perdantes avec le Vietnam. Il sait aussi peut-être que l’agression et l’occupation du Cambodge auxquelles l’Accord de Paris tentait de mettre fin, n’étaient pas entreprises pour des motifs humanitaires. Et là où l’APRONUC rédige les textes pour punir le racisme en direction des Cambodgiens hostiles à la présence envahissante des illégaux, était la résidence du Haut Commissaire de France au Cambodge. Ce dernier fut assassiné dans cette résidence, en pleine sieste par celui qu’on croyait être un innocent travailleur, son serviteur prisé, Viêt-cong. La colère du Général de Lattre de Tassigny à ses obsèques nous rappelle, à nous Cambodgiens, témoins sur place, qu’il peut y avoir plus grave que l’apparence.

Une leçon qui ne peut être partagée par tous. La prudence et la vigilance des Cambodgiens pour préserver l’avenir n’ont jamais été bien comprises par l’APRONUC et une certaine presse, souvent induites en erreur par la méconnaissance des expériences locales. Trouver dans le mot YUON le critère du racisme est une plaisanterie qui a eu cours à Phnom Penh (surtout chez certains journalistes, acquis à une certaine idée qui se copient les uns les autres ...). Les Laotiens, les Thaïlandais désignent toujours cette population du Vietnam actuel par ce vocable. Ils ne sont pas taxés de racistes. Il n’y a pour ce mot aucune connotation particulière, ni péjorative, ni flatteuse. Si le mot YUON est ressenti par certains comme péjoratif, cela ne peut être dû qu’à une psychologie personnelle, liée peut-être à la culpabilité expansionniste connue.

YUONTAC, humour innocent mais apparemment non sans argument, pouvait peut-être susciter quelques ressentiments défavorables aux Cambodgiens.

Stimulée par ces batailles de mots, intéressantes intellectuellement, mais surprenantes pour les Cambodgiens, l’APRONUC a fini par leur apprendre à subir l’illégalité des colons. En repartant, elle a laissé de nombreux illégaux Vietnamiens sur leurs bras, et un arsenal important de mesures relatives léguées par l’ancien occupant. Comment vont-ils réagir ?

SITUATION ACTUELLE

La presse cambodgienne dans son ensemble parle de façon alarmante de la population immigrée, trop nombreuse, trop dangereuse. Elle souhaite son retour à son pays. Elle presse le gouvernement de prendre des mesures, harcèle l’Assemblée Nationale de créer des lois. L’atmosphère est à la surchauffe, attisée par des informations répétées sur les annexions continues aux frontières.

Des colons vietnamiens sont partout : le long du Mékong, là même où auparavant il n’y avait pas de villages vietnamiens, autour des berges du Grand Lac, à Kompong Chhnang, Battambang, Takeo, Prey Veng, Kandal, Kompong Cham, Kratié, Mondulkiri, Rattanakiri... Un déploiement à une échelle insoupçonnée qui frappe intensément tous les Cambodgiens de la diaspora de retour dans leur pays.

Avec le problème de chômage et de pauvreté, comment les Cambodgiens perçoivent-ils ces personnes et leurs implantations dans les Centres de grandes ressources ? Rien ne prédispose à l’optimisme. La situation se rapproche même de l’explosion catastrophique.

HERITAGE

Six mois après le départ de l’APRONUC, le Cambodge doit se débrouiller. Il lui faut résoudre au mieux ce problème, en évitant la violence. Le Vietnam doit montrer sa bonne volonté pour reprendre ses nationaux, à présent que le Vietnam commence à décoller. Le refuser ne pourra que justifier le soupçon sur sa politique expansionniste.

Un seuil de tolérance doit être fixé pour permettre aux cambodgiens de se sortir de leur pauvreté. La communauté internationale, l’ONU en particulier, dont ce problème est en grande partie l’héritage, doit également aider au retour de ces colons, en très grande partie immigrés sous la période de sa gestion.

LES PATRIMOINES ECONOMIQUE ET CULTUREL

PATRIMOINE ECONOMIQUE

Ont été rangés dans le chapitre économique, les ressources naturelles et les biens nationaux et communautaires. C’était un chapitre douloureux et globalement, il le reste. Nous avions constaté et signalé que ce patrimoine était saccagé par l’occupant (cf. RDT/CCV-2, page 16), bradé à grande échelle par l’ex-régime de Phnom Penh en mal de privatisation privée, sauvage et débridée, et la mainmise écrasante et irréversible des affairistes et finances étrangers à la faveur du désordre de cette période de transition. Nous avons dénoncé le découpage douteux du plateau continental ainsi que l’exploitation intensive des mines de pierres précieuses et du bois par la partie du Kampuchéa Démocratique.

Nos propositions sont restées en général sans grands résultats, auprès des parties comme auprès du CNS, pour la simple raison que ce dernier, malgré ses moratoires et décisions, n’avait pas le pouvoir ni l’autorité nécessaire. L’échec de l’application de l’Accord de Paris dans les domaines clés explique la poursuite de cette situation, sauf que dans beaucoup de cas, il n’y avait plus grande chose à brader. La plus de soixantaine de biens publics de taille vendue a bien rempli les poches personnelles et les caisses du parti ; il fallait ensuite se calmer pour consolider le pouvoir, avec comme résultat immédiat actuel un FUNCINPEC vainqueur des élections, pauvre mais pratiquement inopérationnel, et un vaincu riche qui tisse son réseau en achetant ou en corrompant. C’est un peu l’image générale de ce qui reste des élections tenues dans les conditions impropres et précipitées que nous avons dénoncées de façon véhémente (cf. RDT/CCV-2, pages 90 à 98).

Quant aux exploitations intensives de la forêt, à la frontière Est comme à la frontière Ouest, la frénésie se poursuit, menaçant l’écologie de façon irréparable. L’exploitation intensive des pierres précieuses continue de poser les problèmes graves d’épuisement de ressources.

L’APRONUC dans ce domaine a été active, efficace par sa grande volonté et sa compétence, comme par sa sensibilité particulière pour l’environnement et le développement. Ses efforts dans le domaine d’aide internationale à la réhabilitation ont été porteurs. Mais les retombées sont pour l’instant limitées à cause des échecs cités qui n’ont pas permis d’induire un environnement politique sain et stable nécessaire.

Souhaitons que la sagesse l’emporte et que le Cambodge s’en sorte.

PATRIMOINE CULTUREL

On pense en particulier dans ce chapitre aux biens culturels. Mais ils ne sont pas les seuls, bien qu’ils mobilisent un intérêt général, tant les monuments d’Angkor sont prestigieux.

Des efforts internes et internationaux dans ce domaine en vue de restaurer les grands ensembles archéologiques khmers sont prometteurs. La communauté internationale, l’UNESCO comme des institutions privées et officielles, les pays qui ont des moyens et l’expérience (France, Japon...), s’y sont penchés sérieusement, et mettent en place des structures, procédures et moyens nécessaires. Malgré quelques accrocs de départ, il est raisonnable de penser que les efforts aboutiront à des résultats désirés.

Evidemment on ne restaure pas ces sites en un an, ni dans les conditions précaires. Ce sont des œuvres de grande envergure, nécessitant une stabilité très grande et un bon climat de développement. C’est là notre crainte majeure.

 

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   Dernière modification : 12 novembre 1998