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MARS -AVRIL 99
 
 

 
 
 De Cap Vert à Beau Dommage
 
 
 
                 davantage qu'autour de la terre à guerre
                 le plus dangereux des voyages
                 au centre des jours au c¦ur des mots                 
                 où les nerfs se caressèrent seuls
 
                 le plus extrême départ
                 du capitaine qui tordit les entrailles
                 un homme à fables au bout de son ciel
                 au bout de mes quais
 
                 de Cap vert à Beau Dommage
                 à cheval sur une histoire filante
                 une plage de flacons éteints tempête
                 elle mord les douceurs aveugles 
                 et porte des douleurs millénaires
 
                 me laisser mourir sur l'étal inventé
                 à vide du temps à remonter quand 
                 je rencontrai un désert liquide 
                 aux mains de vérités
 
 
 
                                 Marie Mélisou  avril 1999
 
 
" (...)
  Ça ne vaut pas la peine 
  De laisser ceux qu'on aime 
  Pour aller faire tourner 
  Des ballons sur son nez
  Ça fait rire les enfants
  Ça dure jamais longtemps
  Ça fait plus rire personne quand 
  Les enfants sont grands
                      (...)"
 
                  - La complainte du phoque en Alaska-
                                     Beau Dommage
 
 
 
 

 
 
 
ELLE
 
 
 
Elle. Ses ailes déployées sont fragiles. Pourtant Elle 
supporte toutes les forces.
 
Elle évite tous les sacrilèges, ceux qui consistent à 
s'envoyer au néant. Elle se conjugue en affolements 
agités, en affections bouleversées, alarmes choquées, 
douleurs effervescentes, frissons de saisissements, 
transports troublés, ou ébranlements émus.
 
Elle se sépare parfois, incrédule, de ses scrupules. Elle 
précise le transi de la passion, ou engendre les ostentations 
de la fidélité. Elle décroche des petites lucarnes selon son 
sentiment, qui se rapportent elles-mêmes en boomerangs 
fidèles.
 
Sans aucune honte, Elle meuble la distance entre le souffle 
et le vide, les bras ballants, les yeux fermés, l'étreinte 
folle, ou la retenue. Là où Elle était inemployée, à un 
poste désaffecté, Elle peut, d'un coup, mystérieusement, 
se laisser gagner par une sorte de fierté, de reconnaissance. 
Elle se démène sous sa housse. Se découvre, se fait belle, 
et devient le gouverneur d'un palais.
 
Elle est floue, parfois. Elle attire des nuées de reines. 
Elle a des secrets, des raisons. Elle range ce qu'elle voit, 
et voit ce qu'Elle croit. Elle se chiffonne des véhémences 
inaccoutumées et dégagées, ou s'oppose des répliques 
consciencieuses, des têtes baissées sur des épaules raisonnées.
 
Elle. Il lui arrive de bouder quand la pensée ne veut vraiment 
rien comprendre, grincements des vivants sans sens. Elle se 
targue de jouer, Elle tente de provoquer, prend un brin de 
hauteur, enfourche ses grands airs. Elle ballotte le sur 
place quand, incapable de se faire entendre, Elle n'use 
pas mais prend appui sur la vibration, la concentration, 
l'instinctif.
 
Elle sait aussi s'engourdir de délices. Se répéter sans 
s'épuiser, s'accentuer avec gravité, se penchez au bord 
du vide en palpitant, fondre de peurs en angoisses. Ou 
de pleurs en emphases.
 
En couleurs d'espoirs, Elle n'arrive pas toujours à éclore. 
En salle d'attente parfois, couloirs de linoléum grisâtre, 
murs décrépis et veilleuse blafarde ou en palier de 
décompression, palmes au ralenti, oreilles bourdonnantes, 
Elle panique parfois.
 
En pensées vagabondes, il lui arrive de gémir doucement 
sur mon corps. Elle y aime la tendresse, le temps pris, le 
grain de la peau, l'imagination aussi. Projetée, admise, 
allumeuse, Elle chasse les haut-le-c¦ur.
 
Si l'on ne prend garde à Elle, fille gracile, femme fragile, 
Elle se désagrège. Pensive, Elle attire les réserves à 
bonheurs même sans les tentatives d'une profonde volonté. 
Elle agit par sauts de pensées en pensées, recharge 
l'existence, l'atteste.
 
Surtout, ne pas risquer son implosion.
Elle. La belle, la multiple, la modifieuse, la troublante.
 
Elle, l'émotion.
 
 
 

 
 
 Le meneur d'étoiles
 
 
 
               pourtant  encore  toujours
               ce vague du temps que l'on croit indestructible
               perdue j'y cherche par c¦ur mes ignorances
               jusqu'aux tréfonds des brillantes
 
               meilleur  longtemps 
               au milieu de rugueux  poils d'un jour qui voyagent
               grattent simplement mon esprit inscrit en vivant 
               ils glapissent sur les brasiers miséreux             
               le meneur m'étoilait
 
               pourtant  encore  toujours
               les heures déferlent 
               sur un rivage brutal aux blessures sauvages
               le doux de la douceur me chasse m'appelle m'effondre 
 
               meilleur  longtemps 
               des fantômes imperturbables 
               s¦urs d'étoiles semées ancrées attachées
               passent sur la scène où se lit la vie des autres 
               en une honte blessée maudite trahie
 
               sur un chemin de poussières lumière si haut
               si haut que je ne suis pas éclairée 
               prolongée de noir profondément égratignée 
               je sanglote à demi
 
 
 
                                         Marie Mélisou   avril 1999
 
 
 
" A chaque fois qu'il parlait, il faisait allusion au pouvoir 
de l'amour, qui maintenait la raison intacte, et au pouvoir 
de l'incompréhension qui la détruisait. Il me semblait que, 
dans chacune de ses histoires, son imagination à double 
tranchant engageait le combat contre les forces paroxystiques 
du désordre. En effet, l'Homme Dinosaure appartenait à une 
espèce en danger, et sa vie semblait dépendre du fait d'avoir 
toujours en réserve une bonne histoire d'avance sur sa propre 
désintégration. "
 
     -Dinosaur Man- Suzan Baur
 
 
 
 

 
 
 
Un tueur de tous les jours
 
 
 
              il jasa sur de longs hivers juchés
              sur des gréements aux cordages rugueux 
              des quais de tellement loin
 
              jour après jour se réchauffèrent les ombres
              mon corps voyagea en océans approchés
 
              à l'abri de rien douce voile j'avalai
              réclamai offrai crus le vélivoleur
              un tueur ordinaire  un de tous les jours
 
              il s'était intégré à mon pays plat
              mes pleurs troublèrent l'onde de l'étendue salée
              
              preuve par mille des pièges uniques 
              à l'envers de la route
              je lisai l'amour dans du vert bleu invention
 
              comme il respira le temps s'est ouvert            
              ma raison n'en revient toujours pas
 
 
 
                                Marie Mélisou  avril 1999
 
 
 

 
 
 Je voudrais pourtant 
 
 
 
Je voudrais ranger les mois en arrière - écoulés ou écroulés - pour 
entrer d'un pas alerte dans demain. La pile du passé est compacte, 
entremêlée, et pignorative. Quand je m'y attelle sans confabulation 
certains mois s'échappent, basculent. Par pans entiers, des amas 
dégringolent. 
 
Où s'arrête les anciennes limites ? Où commence la lumière hyaline ? 
Ou trouver et regarder l'intact au c¦ur de ce désert pourtant 
congloméré ? 
 
Le présent et le futur fuient, apeurés de mes désordres anciens. Je 
ne sais décider d'un port où faire escale. Naufragée pas échouée, 
terriblement peu accoisée, je suis de ceux qui se perdent en 
avançant, qui adirent le fil en s'analysant. 
Je ne me donne aucune chance de fuite réussie dans l'avant, ni de 
tâtonnements heureux. Je n'y arrive pas. Malgré moi je me trouble, 
alors le futur, impénétrable, se ferme.
 
Je voudrais faire taire l'âme non cuirassée qui hurle, mais son 
introuvable chemin comme peut l'être le secret de la lumière sur la 
neige, éclairante et opaque, lumineuse et trouble, blanche et noire, 
m'empêche de le pouvoir. Mon corps tout entier se délite de ses 
accumulations temporelles douloureuses.
 
Je voudrais pourtant mettre au point une nouvelle règle immatérielle 
à laquelle je m'assujettirais. Combiner l'humanité et le quotidien 
pour enfin trouver une petite place.
 
 
                                    Marie Mélisou  avril 1999
 
 
 
 
" À ce stade de ma réflexion je fondais immanquablement en 
larmes, j'aimais trop Thomas et Suzanne pour imaginer renoncer 
à leur compagnie, le lien qui me tenait à eux était si fort 
qu'il m'arrimait malgré moi à tout ce dont je ne voulais plus.
Mais, les jours passants, j'en vins à douter de plus en plus 
gravement de ce que je pouvais bien apporter à mes enfants. Je 
tombais dans un puits très profond, aux parois faites de doutes 
et de contraintes. 
Je tombais seule et je tombais sans fin. "    
 
                           Marie Desplechin. " Sans moi. "
 
 
 
 
                             Putain de silence
 
 
 
                    certains matins je suis usée
                    autant que mes idées
 
                    au pays de personne
                    offerte et interdite je refuse les regards
                    ils se posent pourtant en une voile à mémoire
                    pour avancer dans le suroît
 
                    je préfère écouter les mots mourir
                    l'un après l'autre
                    crépitements 
    
                    ils dégringolent par ossatures entières 
                    quand d'un stylo impalpable j'efface leurs traces
 
                    j'efface et je n'écris plus
 
 
 
                                     Marie Mélisou   avril 1999
 
 
 
 
 
 

 
 
Crépusculaire ballade au vent
 
 
 
Aiguës, mes mains à ciel vert, en touriste de moi, poignantes, 
s'étirent sans rien préparer. Elles achèvent seules des gestes 
perçants qui ne sont pas miens, sans rien cultiver. Cela 
infiniment, depuis si longtemps, sur la répétition des jours 
qui s'entrechoquent.
 
Pourtant aujourd'hui, juste un instant, mes mains se sont arrêtées, 
suspendues devant le reste d'un fil lumière tissé par le jour, 
apporté par le vent. Une de mes pensées, détournée en frôlement répit 
crissé de l'épuisant, a consommé les noces claires de ces secondes 
rêveuses et agréables. 
Les clameurs de mes mains en rémission relâchée ont hésité sur le 
chant soufflé.
 
Depuis, dehors, dedans, je hurle à l'ordonné comme une possible 
atteinte. Me ranger, me poser, pour dominer ces mains criardes et 
aigres qui s'agitent et me désordonnent.
Je cherche d'où viendrait ce vent nécessaire. 
Celui qui éroderait leurs angles aux phalanges vives. Mollir ou 
résister. Je ne sais si, raides, mes muscles se cimenteraient ou si, 
moelleuses, mes mains se laisseraient bercer comme soie envolée.
 
J'aime les imaginer, rabotées et arrondies, adoucies et cicatrisées, 
lorsque le vent aura travaillé à les encercler, à les changer.
Alors la femme la plus ancienne qui est en moi, celle vieille de cet 
instant qui sera libérateur, la plus touchante, la plus profonde, la 
plus vraie, celle aux gestes gracieux, pourra exister.
 
 
 
                          Marie Mélisou   avril 1999
 
 
 
 
 
 
 PoInts hauts
 
       
               .                  .
              vIlle de la mort délIvrée je me suis promenée
              danses des pas pour oublier quoi ?
 
              se creuser la mémoire
              sur des ombres en miroir           .    .
                           aux méchants tours à cIcatrIser
               .              .      .
              sIlences aux claIrs tamIsés
 
               .                  .
              vIlle de la mort délIvrée sans chemins hantés
              pas de rues veuves aucune recherche de preuves
               .                      .
              sImplement quelques sentIers 
                .              .
              poInt de vue depuIs trop haut
 
                         .                         .
                        dIspersés  pas serrés  oublIés 
 
   
 
                                      Marie Mélisou   avril 1999
 

 
 
 LA FAUX
 
 
                        elle est l'irréparable
                        sans un sourire
                        même en silence jaune
 
                        regards incertains vers le Nord d'elle
                        comment lui pardonner ?
 
                        elle fait ses comptes
                        en mélangeant les couleurs en douleurs
                        trahisons mensonges portes
                        secrets qui ne vont nulle part 
 
                        mal dans son image
                        prisonnière pas pionnière
 
                        ma peine efface son épiderme
 
 
                                   Marie Mélisou  avril 1999

 

 

 

L'ELFE GRIS FONCé
 
 
 
                    enfoncée dans le gris foncé
                    s'envole l'air du vieux temps
                    ainsi se consume la vie
 
                    un elfe vénérable au destin attendu
                    magie et vie dense
                    se souvient de son enfance 
                    en rond il danse
 
                    le gris foncé sur d'aveuglantes clartés
                    fait ressortir l'invisible
 
                    le froid dure tellement longtemps
                    
                    de quel côté se tourne la tête ?
                    une minute trempée déchire les empreintes
                    qui taquinent magie et vie danse
 
                    alors l'elfe oublieux
                    regarde
                    se faner le gris foncé hypnotisé
 
 
 
                                 Marie Mélisou   avril 1999

 

 

 

COUPER L'HEURE
 
 
 
                se déshabituer d'être sentinelle
                savoir gambader autour du gâchis
                
                je fais des ronds dans l'eau en boucles salées
                conserve l'oubli serré dans une boite de fer blanc
                me voue à vibrer dans les mots
 
                langage à te passer
 
                des fois parfois l'envie pressante de me quitter
                de s'en aller du chevet de moi
                
                nos balustrades en partance
                aux destinations sous des vents coulis
                portent des halos de gentils pour résister 
                suppositions 
                elles résident en tracés différents 
 
                si l'envisager s'arrête
                on débranche la prise fichée à mon âme
                rafales régulières sur mes joues
                vie écrasée étouffée tracassée
 
                je suis une dormeuse enlacée à l'arrière
                discrètement garée à vivre
 
       
                                 Marie Mélisou  avril 1999

 

 

 

 

 
<< Marie, qu'est ce qui t'amène ici ? 
      alors tu l'aimes toujours...
      Est-ce que tu l'aimes d'Amour ? >>
                        
                    << Marie >>, Véronique Sanson
 
    
 
 
                  Faisceaux de vérité
 
 
 
Je t'écris depuis le rayon de soleil matinal dans lequel je me 
trouve plongée par hasard. Joyau scintillant qui tombe à terre 
en tournoyant, ces morceaux de lumières recommencent le jour à 
zéro. Ta voix stridente - ou désespérée - sortie de ta copie 
une fois de plus fonce pousse écrase enfonce en moi la stupeur 
comme des mâchoires d'acier. 
 
Je retombe en pluie de rire. Tes affirmations fausses et 
familières ne crissent plus, ne provoquent ni égarements, ni 
craquements. Tes pas sans mon sillage ne sont qu'indifférences. 
Une éblouissante paix infiniment précieuse extirpe tes 
regards de fille faisceau.
 
Je ne suis pas brisée, ni détruite. Jamais. 
Copiée et embrochée, réduite jamais. 
 
D'ailleurs mes renouvellements, émaillés de souvenirs, sont 
innombrables ; ils éventrent le trépidant en riant, les 
enchaînements d'un jour d'août où l'air était une grande 
horloge, ceux de décembre au soleil phocéen où même le sable 
blanc riait de toi.
 
 
                           Marie   1 er avril  1999

 

 

MARS

 

CONFIDENCES DE GARGOUILLES
 
 
 
                tout en haut 
                après tant de marches grimpées
                      vieil escalier en colimaçon
                je rends du souffle 
 
                appuyée
                contre une arche qui m'enjambe 
                regards corrélatifs de visages grimaçants
                accueil torturé des compagnons sculptés
 
                longtemps
                pour une célébration grave
                l'énorme bourdon du clocher tinte
                résonne envahi jusqu'à mes tréfonds
 
                longtemps
                l'instrument creux grave et vibre 
                de façon prolongée 
                il frappe aussi mon extérieur
 
                entourée
                de pierres rendues bleues 
                   peurs  froid  coups  ou ciel
                je vacille
 
                il tombe de la poudre d'ange
 
 
 
                              Marie Mélisou   mars 1999

 

 

 
  éTENDUES DISTANCES
 
 
 
                   mort-nés
                   sur la montagne qui se tard
                   les blés s'agenouillent
 
                   alors 
                   les hommes 
                   prennent leurs bateaux sur les épaules
                   et sans derniers regards
                   partent 
                   avec l'aigu des gestes tristes
 
 
                                 Marie Mélisou   mars 1999

 

 LES POINTS HAUTS
 
    
                   j'ai égaré le présent
                   et ses clés secrètes
 
                   mon esprit perdu en charpi
                   va d'inclinations aussi obstinées
                   en portes d'entrées à trouver
 
                   des chemins volants
                   ou des fantaisies débridées
                   exaspérées et crispées
                   truffent mon temps
                   d'immanquables rendez-vous
                   pour m'initier au décollage
 
                   secousses sismiques
 
 
                                Marie Mélisou   mars 1999

  IL EST TARD
 
 
                    tu ne combles pas 
                    ce qui n'ira jamais au bout
                    tes illusions sans solidité 
                    possèdent une blancheur souillée
 
                    il est tard
                    doucement tirer sur toi
                    la mémoire de l'oubli 
 
                    il s'installe déjà
 
 
 
                             Marie Mélisou  mars 1999
 

 QUIéTUDE ORANGéE
 
 
 
                       quiétude orangée
                       en avalanche lente
 
                       une petite fille en plein vent 
                       lutinée par les airs en courants marins 
                       regarde le salé droit devant 
                       l'espoir couchant en beauté
 
                       elle étreint l'incendie
                       de ses yeux jusqu'aux îles
                       touchées de l'horizon
 
                       elle s'étonne de bonheur
                       d'être là à border le soleil 
                       qui pour la premier fois
                       se couche avant elle
 
 
                                Marie Mélisou  mars 1999
 

  DE SOI 
 
 
                  au contraire de naguère 
                  savourer l'imprévu de soi
                  s'étonner d'aventures
 
                  elles ouvrent des persiennes
                  et tournent des pages
 
 
 
                              Marie Mélisou   mars 1999

 Souffle décomposé
 
 
           un jour à l'envers du sens de la vie
           j'ai fermé les yeux d'un enfant
 
           lorsque je dis un jour
           c'est faux
 
           car chacun de mes jours 
           je ferme et referme ce geste
 
           sans jamais plier l'amour
 
           mes pensées 
           en état de décomposition avancées
           se laissent mener bouleversées
           au gré de petites morts
 
           mon souvenir
           en carrefour sans oublis tortueux
           se coude à coude à mes piétinements
           devant les fleurs à arroser
 
           buveuse assoiffée d'encore
           pour le cas où un souffle m'ait échappé
           sans cesse
           je ferme et referme ce geste unique
 
 
 
                    Marie Mélisou  mars 1999
 

  ICI
 
 
                  ici la mer a donné
                  sa possessivité aux inconnus en arrêt
                  on y loue tous les vents
                  et les retours enrichis depuis des océans épuisés
 
                  l'amour glisse entre les jours
 
                  ici se bat la vie
                  entre serpolet et thym
                  un berger trouve des passages immortels
                  à l'heure où l'olivier s'essouffle
 
                  repos méditerranéen prend le relais de la lumière
 
                  ici après la place franchie
                  puis les seuils lumineux
                  en limites frontières
                  on découvre le façonnement des dedans
 
                  ils sont tout le contraire de leurs volets clos
 
 
 
                                    Marie Mélisou  mars 1999

  Je m'haine
 
 
     m'attarder plus longtemps au bord 
     sans embarquer
     ni illustres badauds ameutés
 
     j'échoue à l'assaut des montagnes
     referme
     même à barreaux les collines
     ne sachant ni planter ni travailler
 
     antre à pourrissoir
     n'y croît que le malaise
 
     mission
     me consacrer aux cloisons à lutter
     - double vécu des êtres normaux -
     contre mon tangage
 
     incidents évolués 
     en veine de se réjouir d'être 
 
 
             Marie Mélisou   février 1999

 Saisir le réussir 
 
 
 
          réussir une vie très ratée
          hors d'atteinte des éclairs de rire
 
          être dramatique
          le blanc de l'horizon disparu en rage
          écoute les larmes glisser sur la table
 
          bel ensemble de révoltes révélées 
 
          dégoûts intelligents où bégaie se cramponner
          violence des rouleaux
          crêtes au plus loin des sables
          se débattre pour échapper à l'or pâle
 
          charmeur désert aux vallées sans larmes
 
          s'accable le hanté des remèdes essayés
 
          se brûle le ventre
          la panique saisit d'un silence hypocrite
          me chuchote de petites phrases apaisantes
 
          tapage où règne le vide géant 
          en ligotant les solutions tentées
 
          je veux de tendres méprises chaleureuses joyeuses
          dévalerait le fredonnant du fantasque 
           
          libellule campagnarde à noyer ces désarrois 
 
          tout réussir
          jusqu'à une judicieuse extinction
 
 
 
                          Marie Mélisou  février 1999
 
 

 
COMME VOUS
 
 
 
                        des anges passent
 
                        plusieurs
 
                        tout un vol
 
                        les hommes fous vaniteux
                        n'y croient pas
                        pour installer une seconde lune
                        il est nécessaire d'avoir un second ciel 
                        disent-il
 
                        longtemps
                        comme chaque femme
                        j'ai bercé la douleur d'avant en arrière
                        d'arrière en avant
                        recroquevillée
 
                        tout un vol
 
                        plusieurs
 
                        un seul ange suffit
 
 
 
                                  Marie Mélisou mars 1999

 UN CHAGRIN DE SEMAINE 
 
 
                    l'âge passe vite d'être
                    si vaste et unique
                    entre les mots
                    les sentiments gracieux
 
                    depuis que le silence retrouve la vie
                    ses cheveux d'encre
                    odeurs de ce temps-là
                    croquent l'instinct caché dessous
                    parure allure armure
 
                    paniques brouillonnes d'un jour
 
                    en impétueux diapasons
                    sur un chemin perdu
                    son c¦ur d'oiseau métamorphosé
 
 
                             Marie Mélisou  mars 1999